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Le Blog à Jean-Mi ! Posts

Dieu est amour – encyclique « Deus est caritas – Benoît XVI

On a assez dit que le cardinal Ratzinger devenu le pape Benoît XVI était un sale coup pour l’ouverture de l’église catholique sur les points de litige comme l’avortement, le divorce ou l’homosexualité. Bref son cas est réglé: il s’agit d’un conservateur traditionnaliste. Donc sans intérêt. D’autant plus qu’il n’a pas le même charisme populaire et la même fougue communicative que son prédécesseur et maître. On l’attendait donc au tournant de sa première encyclique!

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Eh bien, la voici. Et on n’est pas déçu! Car c’est un texte absolument remarquable pour qui s’intéresse à la théologie. Divisé en deux parties à peu près égales. La première traite de la nature de l’amour dans la perspective chrétienne, au plan théologique. La seconde aborde l’exercice de l’amour par l’Eglise, donc un aspect nettement plus concret. Dans la première partie, Le pape nous rappelle qu’il fut et demeure un grand théologien. Sa démonstration de l’unité de l’amour est proprement impeccable (ce qui est la moindre des choses pour un homme infaillible!). Il réussit à se sortir du piège de la sexualité de manière très claire et à la relier à l’amour divin dans un enchaînement démonstratif remarquable. L’amour divin est ainsi posé in fine comme la fusion de l’Eros et de l’Agape et c’est ce qui lui donne sa valeur supérieure. Dans la seconde partie, il en tire les conséquences pour l’oeuvre de l’Eglise: la charité n’est pas un devoir, elle n’est pas une obligation, elle est la manifestation consubstantielle d’une vie remplie de l’amour divin. la charité ainsi manifestée ne sélectionne pas les personnes à aider mais s’adresse à tous comme Dieu aime tous. De plus, faire le bien n’implique aucun prosélytisme. Pour le chef de l’église catholique romaine, il fallait bien terminer par un retour à la « mère de Dieu ». Les trois dernières pages apparaissent comme un exercice de style pour « placer » le culte marial et paraissent décalées par rapport à ce qui précède. Mais si l’on fait abstraction de cette conclusion pro domo, le propos concerne tous les chrétiens et peut parler tout aussi bien aux autres croyants ou aux hommes de bonne volonté. Si l’on compare le ton de ce texte au « traité d’athéologie » qui roule le catholicisme dans la poussière, il y a matière à chacun de se faire un avis sur qui peut être le plus utile à la société du temps présent (cela n’enlève rien aux erreurs monstrueuses commises par cette église catholique romaine dans le passé!).

Un petit texte par la durée (une soixantaine de pages) mais important par son message et sa hauteur de vue. Un livre vendu à petit prix (4,50 €) qui peut permettre à beaucoup de se faire une opinion personnelle sur le pape, que l’on reconnaisse ou non sa légitimité.

J.M. Dauriac

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Traité d’athéologie – Michel Onfray – Pourquoi tant de haine?

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Un livre de combat extrêmement violent dans ses assertions. L’auteur veut poser l’athéisme dans la laïcité, non comme une alternative mais comme une vérité scientifique donc unique. Cet ouvrage est donc une tentative de démolition systématique des croyances religieuses, mais comme l’auteur est incroyablement occidental, il ne combat en fait que les trois monothéismes et, en priorité, le catholicisme romain, qui a droit a toute sa virulence et qu’il confond totalement avec le christianisme (l’Histoire lui donnant le droit absolu de cette confusion, mais pas l’objectivité de la recherche). Pas une seule fois, il n’est fait allusion au protestantisme et très peu souvent à l’orthodoxie. L’Islam bénéficie de toute l’ironie mordante de l’auteur et passe à la moulinette destructrice de son rationnalisme. Si le livre est importé en pays musulman, Onfray aura droit à une fatwa en règle contre lui! Car les musulmans ne supporteront pas le quart de ce qu’il sait pouvoir asséner aux Catholiques, grâce à la laïcité dont il pense pis que pendre sous sa forme actuelle. Le judaïsme en prend pour son grade, comme auteur premier de la fable religieuse qui asservit les hommes au crétinisme de la croyance. Bref tout ce qui fonde l’occident est à reconsidérer sur son versant judéo-chrétien, mais aussi sur le versant platonicien, car déiste. Il ne reste pas grand chose à sauver de l’héritage, à part Démocrite!

C’est sans nul doute le livre le plus personnel de l’auteur. Il y règle visiblement ses comptes avec son éducation catholique. Il s’y investit complètement. C’est souvent très ironique, parfois brillant.Mais l’omission des religions animistes ou de tout le versant oriental des croyances lui ôte toute prétention à justifier son titre. Ce n’est en rien un « traité ».
Il faudrait tout un livre ou plusieurs longs articles pour réfuter le contenu (et cela ne serait à mon avis d’aucune utilité) et souligner les erreurs ou les torsions volontaires des textes (notamment issus des livres sacrés des trois monothéismes). Il me semble qu’il vaut mieux en retenir un fait patent: Il n’y a rien de nouveau sous le soleil de l’athéisme, et dans ce livre en particulier.

La Raison est toujours pensée comme sans faille et la science comme vérité absolue. Position estimable mais très occidentale, qui fait fi des autres modes de pensée tous inférieurs. La ridiculisation catégorique (au sens kantien) n’est pas en soi une démonstration. La décontextualisation d’un texte est la stricte imitation de ce qui est dénoncé dans ce livre sous le nom de « prélèvement », ce qui justifie, d’après Onfray, toutes les horreurs dues aux religions. Le déni herméneutique est un moyen un peu court pour clore le débat. Bref, en n’acceptant pas que d’autres modes de pensée existent à égalité avec la raison matérialiste, Michel Onfray limite son traité à n’être qu’un pamphlet de plus et, qui plus est, d’une violence souvent insupportable dans l’insulte. Assez surprenant de la part de quelqu’un qui reproche exactement cette violence à ses adversaires. La loi du talion serait-elle hédoniste?

J.M. Dauriac

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La fabrique du Crétin

Un pamphlet comme il en parait régulièrement à la rentrée des classes. Un ouvrage-maison, écrit par un héros de l’école de la république, normalien supérieur, agrégé de lettres et professeur de puis trente ans. Donc une bonne connaissance du système éducatif et les moyens de l’exprimer. Se lit d’ailleurs très facilement, mais s’oublie presqu’aussi vite. Du moins dans le détail, car le message central, lui, reste bien gravé dans nos mémoires!

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Quel message? L’école, par une politique constante depuis plus de 25 ans, est devenue une machine à fabriquer des crétins, au sens premier du terme. Il ne s’agit nullement d’un complot lucide et machiavélique, mais d’une succession de décisions, réformes et concessions électoralistes qui ont brisé l’école de la république, qui était pourtant une des meilleures du monde et le pilier de l’intégration nationale. Dans sa démonstration, Jean-Claude Brighelli frappe souvent fort et très juste: comment ne pas dénoncer « l’élève au centre du système éducatif », le relativisme culturel qui met l’opinion de l’élève au même niveau que le savoir du professeur, les programmes « light » déguisés en cuistrerie pour mieux tromper les consommateurs d’école, le formatage des enseignants recrutés par les IUFM, la perte d’autonomie pédagogique du maître…? Sur le constat, on est d’accord, et j’aurais pu écrire bien des pages de ce livre, et en rajouter de savoureuses, car, à l’expérience de Brighelli, passé du collège à l’université, je peux ajouter, pour mon cas, que je suis allé de la « maternelle à l’université ». L’essentiel du propos est donc exact. L’école d’aujourd’hui a en réalité abdiqué toute ambition culturelle de haut niveau pour ses élèves; elle fait de la massification et cela ne peut se faire, bien évidemment, qu’au détriment de la qualité générale du fond, sauf à admettre que tous les élèves ont les mêmes potentialités intellectuelles, ce qui est électoralement porteur mais scientifiquement faux. On peut parfois, à la lecture de ce livre, s’interroger sur la position politique de son auteur: est-il réactionnaire ou progressiste? défend-il un modèle passéiste avec nostalgie ou veut-il maintenir une école de qualité moderne?

Ce qui limite considérablement la portée de ce livre est sa nature même: les pamphlets ont pour vocation première de dénoncer violemment, pas celle de proposer des solutions. Et dans le cadre d’un débat sur l’école, il faut vraiment parler concret et offrir des perspectives, faute de quoi il est facile de passer pour un simple oiseau de malheur. Or sur un volume de 221 pages, J-C Brighelli consacre à peine 7 pages à proposer des pistes, dans un chapitre intitulé « Quelle école pour demain? ». C’est vraiment trop court! Un professionnel aguerri comme lui devrait justement user de son expérience pour ouvrir des voies de restauration d’une école de qualité. Il ne suffit pas de flinguer les ZEP en les stigmatisant comme une relégation supplémentaire, il faut dire que faire avec ces élèves-là, et ne pas sans tenir aux heureuses exceptions de l’opéra en latin ou de la poésie parnassienne. Oui, on peut faire de l’excellence en ZEP: je l’ai pratiquée pendant 16 années, j’en ai touché les bénéfices moraux et les élèves les bénéfices scolaires. Mais des classes limitées à 25 et des possibilités matérielles plus nombreuses étaient très précieuses, surtout en lycée; nier cela est se voiler la face. Je pourrais multiplier les exemples de sujets abordés par ce livre où la critique virulente est la seule expression. J’attends maintenant le tome 2, avec les propositions!

Bref, un livre comme il y en a déjà eu beaucoup, qui sera récupéré par les ennemis de l’école républicaine pour prôner le libéralisme des services, soit la fin d’une utopie scolaire en marche: celle d’une école qui intègre tous ceux qui la fréquentent, qui donne à tous une instruction de base et permet aux plus brillants, quels qu’ils soient de réussir des parcours de qualité. On peut enrayer le fabrique des crétins, d’abord individuellement, en enseignant selon sa conscience laïque et républicaine (ce qui amène souvent à ne pas appliquer les textes officiels des divers ministres éjectables qui passent à ce ministère). Ensuite collectivement, si les enseignants font autre chose qu’appliquer des recettes et user de fiches toute prêtes, s’ils gardent de leur métier la haute idée de l’éducateur, du passeur, du maître. Sans démagogie, sans mépris, avec la passion qui sied à ce formidable défi: former des individus libres et responsables. No pasaran.

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