Petit traité posthume du philosophe allemand qui n’a pas l’image d’un comique. Et pourtant ce texte, si on prend la peine de le lire au second degré est formidablement drôle et n’aurait pas déplu à Jean Amadou, auteur d’un inoubliable « Il était une mauvaise foi ».
A dire vrai, ça commence moyennement dans l’optique de la franche rigolade. Arthur consacre la première partie de son traité à poser les définitions de ce qu’est pour lui la dialectique, notamment en prenant ses distances par rapport à Aristote, dont on sent dès le départ qu’il est le père qu’il va tuer ici. Il commence par distinguer la logique et la dialectique
» La logique s’intéresse uniquement à la forme des thèses avancées, la dialectique à leur contenu ou à leur matière… » page 12
Puis il précise ce qu’il entend par dialectique aristotélicienne, soit:
» Nous devons donc rassembler sous le terme de dialectique aristotélicienne la sophistique, l’éristique et la périastique, et la définir comme l’art d’avoir toujours raison dans la controverse. » page 13
Dès lors il va poser le principe de son livre. Pour Arthur, la logique et la dialectique sont une seule et même chose. la dialectique éristique cherche à toujours avoir raison, la sophistique y parvenant par des conclusions fausses. Sous des allures très conventionnelles, ce premier chapitre est un dynamitage de la pensée d’Aristote et un constat totalement cynique: nous ne discutons pas pour faire surgir la vérité du «fond du puits» comme le disait Diogène, mais pour avoir raison; le moteur n’est pas notre soif de savoir ou de vérité mais notre vanité innée. Son ouvrage aura donc pour propos de permettre à son lecteur de triompher à tous coups dans une controverse.
Il expose ensuite les différents modes de la controverse: le mode {«ad rem»}, qui s’attaque au fond de la controverse elle-même, son objet; le mode {«ad hominem»}, qui s’attaque à celui qui discute avec nous, au travers de sa démonstration ou de sa personne. Suivent les méthodes de réfutation: soit directe en attaquant les fondements du discours, soit indirecte, en s’attaquant à ses conséquences. dans ce cas prècis existent encore deux sous-méthodes, la {conversion} ou l{‘instance}. La conversion consiste à adopter la thèse de l’autre et à démontrer qu’elle produit une conclusion fausse. L’instance consiste à démontrer l’erreur de la proposition en prenant des cas isolés où cela ne marche pas. Tout l’art de la controverse réside dans la combinaison de ces modes et méthodes.
Si l’on s’en tenait là, ce serait un petit cours de philosophie sur un aspect de la réthorique, point du tout drôle et original. C’est en fait le contenu de la seconde partie qui dévoile l’humour décalé d’Arthur. En effet il y expose 38 stratagèmes pour avoir toujours raison, et c’est parfois franchement comique, encore plus quand on songe à l’auteur, pas vraiment un luron!