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Le Blog à Jean-Mi ! Posts

Le crépuscule de la France d’en haut – Christophe Guilluy – Flammarion – 2016-

 

 

Ce livre est le troisième volet d ‘un tryptique consacré à la fracture française, dont la publication a commencé en 2013, avec « Fractures françaises », puis ‘est continué en 2014 avec « La France périphérique » et s’achève, au moins temporairement avec le titre présenté ici. Tout ayant commencé en 2000 avec la publication d’ un « Atlas des fractures françaises » chez L’Harmattan.. Depui0  s plus de quinze ans donc, Christophe Guilluy explore la société française en géographe autour des lignes de séparation sociales, politiques, économique set humaines qui se manifestent dans notre pays. Il faut se souvenir qu’Emmanuel Todd, avant lui, avait inventé l’expression « Fracture sociale » que Jacques Chirac avait préemptée sans vergogne pour sa campagne victorieuse de 1995 et dont on sait à quel point elle n’eut aucune suite ni mise en œuvre dans ses deux mandats.

 

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Il vaut mieux avoir lu « La France périphérique » avant de lire ce volume, tant il s’appuie dessus et en est le contretype. Dans ce précédent volume, l’auteur avait fait le portrait d’une France abandonnée à ses ennuis et à sa misère par la France gagnante. Son diagnostic était sans complaisance et lui a valu l’ostracisme de la gauche bien-pensante, alors même que, comme Michel Onfray ou Jacques Julliard, il est incontestablement homme de gauche. Mais la chape de plomb de la pensée unique sévit beaucoup plus à gauche depuis vingt ans qu’à droite, il est extrêmement aisé de le démontrer par les tribunes publiées dans la presse de droite par des penseurs de gauche qui ne peuvent plus le faire que là.

 

Les idées fortes sont peu nombreuses dans ce livre, qui n’est pas un ouvrage universitaire mais un livre grand public. F. Guilluy prend cependant la précaution de citer toutes ses sources qui sont sérieuses et étatiques le plus souvent. L’idée qui arme tout le livre et qui est répété à satiété est que les élites diverses (de la pensée, de l’économie, de la politique et de la culture) se sont non seulement coupées de la France modeste, mais la rejettent par un certain nombre de procédé techniques et médiatiques, au nom de valeurs humanistes dont elles auraient l’exclusivité et la compréhension. De cette idée majeure d »coulent des idées mineures qui valident la thèse. Les élites ont fait des métropoles ce que Guilluy appelle « les nouvelles citadelles » qui pilotent le pays et excluent ou incluent les populations. Ces citadelles reposent sur une nouvelle féodalité qui se consolide avec le temps. Une quinzaine de métropoles à l’échelle du pays dominent les secteurs-clés de l’économie, de l’emploi et de la pensée sous toutes ses formes. S’y retrouve une partie de la France périphérique, au titre de la force de travail non qualifiée nécessaire aux basses besognes. La société s’y est américanisée totalement et use des médias comme paravent de ses manœuvres idéologiques. La ségrégation spatiale est son arme, camouflée derrière le discours sur la diversité qu’elle promeut mais en évitant surtout, pour les dites-élites, de la vivre au quotidien. Paris en est la quintessence. Cette société ne cherche nullement à assimiler ou intégrer les arrivants, elle a tout misé sur le multiculturalsime de fait et choisit de plutôt misé sur les immigrés que sur les classes populaires traditionnelles (ouvriers et employés). Tout ce modèle repose sur un contrôle médiatique sans faille qui crée les représentations collectives nécessaires à la poursuite des choses. Mais ce schéma se grippe, car les classes populaires se sont nettement désaffiliées du discours politiques et sont entrain d’inventer d’autres modèles de terrain, dans une solidarité contrainte, qui laisse le champ politique abandonné.  C’est ici que sont présentées les deux idées les plus intéressantes de ce livre qui, par ailleurs se répète pas mal.

 

La première idée donne son titre au dernier chapitre : « Le marronnage des classes populaires ». Guilluy développe l’idée que les catégories abandonnées de la France périphérique se comportent comme les nègres marrons des plantations d’outre-atlantique. Il s’agissait des esclaves en fuite qui allaient se cacher dans des terres inaccessibles et y créaient une société nouvelle détachée du monde des maîtres. Ce fut le cas du peuplement des cirques de l’île de la Réunion, refuges de négres marrons en raison de leur isolement.. les bayous du Mississippi jouèrent aussi ce rôle pour les esclaves américains. Cette approche est intéressante car l’étude du terrain la valide à de nombreuses échelles. Il existe une forme de contre-société en marche dans les espaces marginaux du pays, et ceux qui la composent et l’animent ne sont pas de hippies ou des baba cool, mais des français moyens que l’on a relégués et qui ont pris le parti de vivre autrement. Dans son très beau livre « Remonter la Marne », Jean-Paul Kauffmann utilise le mot « conjurateur » pour désigner ces hommes et ces femmes qui se battent pour conjurer le sort qu’on leur a jeté ou qu’on leur fait subir. L’idée est la même : les gens qui « marronnent » selon Guilluy sont les « conjurateurs » de Kauffmann. Il y a maintenant tout un travail fait pas des chercheurs et penseurs libres pour mettre en évidence ces initiatives sociales, économiques et culturelles qui fleurissent dans les territoires des villes moyennes et petites et dans l’hyperruralité comme on dit aujourd’hui à Paris. Il faut synthétiser tout cela pour saisir l’évolution irréversible qui coupe la société française en deux groupes qui n’ont plus grand chose en commun. Mais l’appréhension de cette forme émergente de marronnage ou de conjuration est porteuse d’espoir, d’autant plus qu’elle a lieu dans un contexte de sobriété subie qui est l’avenir de nos sociétés, n’en déplaise aux technophiles béats qui veulent nier l’appauvrissement planétaire des ressources et l’impasse qui nous attend s nous n’entrons pas dans la « conversion écologique » dont parle le pape François.

 

La seconde idée est plus politique et traduit bien la manipulation des mots et des médias que réalise la caste dirigeante de droite et de gauche ici réunie par la promotion et la défense de son modèle social mondialiste et ségrégatif. Il s’agit de l’usage de l’antifascisme (et donc en creux de l’usage du mot et de l’idée de fascisme).

«  Véritable arme de classe, l’antifascisme représente en effet un intérêt majeur. Il confère une supériorité morale à des élites délégitimées en réduisant toute critique la mondialisation à une dérive fasciste et raciste . » page 173

Ce propos est clair et rend bien compte d’une technique rodée, qui consiste à traiter de fasciste tout individu qui remet en cause le modèle actuel mondialiste, multiculturaliste, métissé, technophile et libéral. L’anathème est immédiat et les médias le répercutent ad nauseam. Citons les cas de Finkielkraut interdit de venue au rassemblement de Nuit Debout ou de Michel Onfray, devenu brutalement réactionnaire parce qu’il dit des évidences niées par les bobos socialos qui font le contrôle médiatique. Cela serait dérisoire si l’on s’adressait à un public qui sait ce qu’est le fascisme. Mais ce n’est plus du tout le cas. Les mots « fascistes » et « nazis » sont instrumentalisés en dehors de toute vérité historique et idéologique. Est « fasciste » tout ce qui s’oppose clairement à la doxa dominante décrite en quelques qualificatifs ci-dessus. Il est donc aisé de constituer un front antifasciste contre une menace qui n’est pas réelle. Guilluy renvoie, et je le fais aussi, au livre de Pier Paolo Pasolini, « Ecrits corsaires », chez Champs-Flammarion, où, dans de nombreux articles de combat publiés dans la presse italienne nationale au début des années 1970, il dit de manière très claire ce qu’est le fascisme et ce qu’il n’est pas. Il avait su distinguer bien avant nous la dérive qui règne aujourd’hui et interdit tout vrai débat d’idée en France. Sont également frappés d’indignité nationale le souverainisme, les revendication régionalistes ou la promotion des identités locales.

 

Guilluy termine par l’idée que demain on pourrait faire un suffrage à points qui hiérarchiserait les électeurs en fonction de leurs « aptitudes » à bien voter. Il s’appuie sur l’exemple de l’analyse des résultats du Brexit par les médias français et les experts. En gros, ce vote est celui d’imbéciles qui n’ont rien compris à leur propre intérêt ; il faudrait donc ne pas tenir compte de ce vote ou en réorganiser un qui donnerait un résultat conforme à la pensée dominante. La même chose s’est produite en 2005 au moment des résultats du référendum sur le trait européen constitutionnel que les Français ont rejeté. Les propos des commentateurs et hommes politiques divers ont été ignobles de mépris pour les citoyens français et laissaient déjà augurer de l’objectif de ces classes dirigeants hors sol. Anne Hidalgo à Paris en est le plus magnifique exemple.

 

Ce livre n’est pas exempt de défauts formels, notamment dans ses répétitions, mais il a le mérite de dire tout haut ce que nous sommes nombreux à penser. Il va l’encontre de toute une doxa universitaire géographique que je connais parfaitement et qui empêche toute discussion au fond, en privilégiant un formalisme stérile et une pensée monocolore élaborée par quelques groupes parisiens essentiellement. Reclus, reviens, ils sont devenus fous !

 

Jean-Michel Dauriac

Beychac, le 13 octobre 2016

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Eloge de la faiblesse – Une position anticonformiste chrétienne

 

 

Lecture  introductive :

 

2 Corinthiens 11 :30

« S’il faut se glorifier, c’est de ma faiblesse que je me glorifierai. »

2 Corinthiens 12 :6 à 10

« 6  Si je voulais me glorifier, je ne serais pas un insensé, car je dirais la vérité; mais je m’en abstiens, de peur que quelqu’un ne m’estime au-dessus de ce qu’il voit ou entend de moi, 

7  à cause de l’excellence de ces révélations. Et pour que je ne sois pas enflé d’orgueil, il m’a été mis une écharde dans la chair, un ange de Satan pour me souffleter, pour que je ne sois pas enflé d’orgueil. 

8  Trois fois j’ai supplié le Seigneur de l’éloigner de moi, 

9  et il m’a dit: Ma grâce te suffit, car ma puissance s’accomplit dans la faiblesse. Je me glorifierai donc bien plus volontiers de mes faiblesses,  afin que la puissance de Christ repose sur moi. 

10  C’est pourquoi je me plais dans les faiblesses, dans les outrages, dans les privations, dans les persécutions, dans les angoisses, pour Christ;  en effet quand je suis faible, c’est alors que je suis fort. »

2  Corinthiens 4 : 7 à 10

« 7  Nous portons ce trésor dans des vases de terre, afin que cette puissance supérieure soit attribuée à Dieu, et non pas à nous. 

8 ¶ Nous sommes pressés de toute manière, mais non écrasés; désemparés, mais non désespérés; 

9  persécutés, mais non abandonnés; abattus, mais non perdus; 

10  nous portons toujours avec nous dans notre corps la mort de Jésus, afin que la vie de Jésus se manifeste dans notre corps. »

 

Introduction :

 

Nous avons ici affaire à un texte écrit à la première personne :Paul parle de lui, comme très souvent dans ses lettres. Ce qu’il déclare est d’abord un témoignage personnel. Ces affirmations deviennent ensuite un enseignement spirituel pour l’édification personnelle des croyants. Il n’y pas là de théologie. Aucune vérité sur Dieu ou Jésus. Seulement une méditation à partir d’un vécu – qui, lui, incorpore la grâce de Dieu -, pour orienter la vie d’un chrétien dans la bonne direction.. Que dit Paul dans ces textes :

  1. Il y a une certaine possibilité de se glorifier de sa faiblesse, donc d’en faire l’éloge.
  2. Il donne sa vie en exemple et l’échec de sa prière. Cette faiblesse correspond à une réponse du Seigneur toute en paradoxe.
  3. Quel est  le contenu de cette faiblesse, sa limite et sa finalité ?

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 Paul de Tarse peint par Rembrandt

Paul défend son apostolat par sa faiblesse

 

Les chapitre 10 à 12 de cette seconde lettre aux Corinthiens sont une défense de Paul, qui répond a des critiques à lui adressées et explique son apostolat particulier – il n’est pas un apôtre historique qui a connu Jésus et l’a suivi -. Le ton est souvent polémique. Il en vient à expliquer ses combats et ses épreuves, à partir de 11 : 16. Et l’angle d’attaque est la faiblesse, corrèle très bizarrement avec le fait de « se glorifier ». Généralement la faiblesse est perçue comme un défaut et il n’y a pas lieu de s’en réjouir, à plus forte raison d’en tirer gloire.

 

Dans le chapitre 10, il emploie cinq fois le verbe « se glorifier », entre 10 :13 et 18 :

 

« 13  Pour nous, nous ne voulons pas nous glorifier hors de toute mesure, nous prendrons au contraire pour mesure le domaine que Dieu nous a départi en nous faisant parvenir aussi jusqu’à vous. 

14  Nous ne dépassons pas nos limites, comme si nous n’étions point parvenus jusqu’à vous; car c’est bien jusqu’à vous que nous sommes arrivés avec l’Évangile du Christ. 

15  Nous ne nous glorifions pas, hors de toute mesure, des travaux d’autrui.  Mais nous avons l’espérance, si votre foi augmente, de devenir encore plus grands parmi vous, dans notre propre domaine, 

16  en évangélisant les contrées situées au-delà de chez vous, au lieu de nous glorifier de ce qui a déjà été fait dans le domaine des autres. 

17  Que celui qui se glorifie, se glorifie dans le Seigneur. 

18 Car ce n’est pas celui qui se recommande lui-même qui est approuvé, c’est celui que le Seigneur recommande. »

 

En 11 : 17, on le retrouve trois fois en deux phrases :

 

« 17  Ce que je dis, je ne le dis pas selon le Seigneur, mais comme hors de sens, avec l’assurance d’avoir de quoi me glorifier. 

18    puisque beaucoup se glorifient selon la chair, je me glorifierai aussi. »

 

Louis Segond a traduite « Kauxaomai » par se glorifier ; on pourrait dire aussi : « s’enorgueillir, être fier de, mettre son orgueil, tirer sa fierté de ; se vanter ». L’idée de faire sa propre gloire soi-même est partout présente. Or nous ne nous vantons que de ce qui , à nos yeux, peut nous grandir, nous individualiser ou nous distinguer d’autrui et de la foule des autres.

 

Puis suivent les détails de ses  souffrances pour l’œuvre de Dieu – ce ne sont pas des fantasmes, mais cela      est confirmé en grande partie par le rédacteur des Actes des Apôtres, l’évangéliste-médecin Luc.

 

Et on arrive à ce qui est le centre de la démonstration de Paul : la faiblesse, sujet de gloire pour lui. SA faiblesse revendiquée. Ce qui ne peut que laisser perplexe, si on pense à l’évangile qu’il annonce ( voir Ephésiens 1 : 15 à 19 ).

 

« 15 ¶ C’est pourquoi moi aussi, ayant entendu parler de votre foi au Seigneur Jésus et de votre amour pour tous les saints, 

16  je ne cesse de rendre grâces pour vous: je fais mention de vous dans mes prières; 

17  afin que le Dieu de notre Seigneur Jésus-Christ, le Père de gloire, vous donne un esprit de sagesse et de révélation qui vous le fasse connaître; 

18                qu’il illumine les yeux de votre coeur, afin que vous sachiez quelle est l’espérance qui s’attache à son appel, quelle est la glorieuse richesse de son héritage au milieu des saints, 

19 et quelle est la grandeur surabondante de sa puissance envers nous qui croyons selon l’action souveraine de sa force. »

 

Un exemple concret de la vie de Paul et la parole révélée du Christ

 

2 Corinthiens 12 : 7 à 10

 

« 7  à cause de l’excellence de ces révélations. Et pour que je ne sois pas enflé d’orgueil, il m’a été mis une écharde dans la chair, un ange de Satan pour me souffleter, pour que je ne sois pas enflé d’orgueil. 

8  Trois fois j’ai supplié le Seigneur de l’éloigner de moi, 

9  et il m’a dit: Ma grâce te suffit, car ma puissance s’accomplit dans la faiblesse. Je me glorifierai donc bien plus volontiers de mes faiblesses,  afin que la puissance de Christ repose sur moi. 

10  C’est pourquoi je me plais dans les faiblesses, dans les outrages, dans les privations, dans les persécutions, dans les angoisses, pour Christ;  en effet quand je suis faible, c’est alors que je suis fort. »

 

Ce texte contient plusieurs éléments dignes d’intérêt :

  • « une écharde dans la chair » : cette si petite chose qui peut nous faire tant souffrir et dont nous avons tant de mal parfois à nous débarrasser tant elle est minuscule et profondément enfoncée. Le mot n’est pas choisi au hasard, bien sûr. Cette écharde a fait couler beaucoup d’encre. Personne ne sait de quoi il s’agit : certains ont parlé de la mauvaise vue de Paul, d’autre d’une maladie de peau, etc.. Cela n’a en fait aucun intérêt de le savoir, car l’écharde est ici un concept. Le mot grec veut dire aussi bien « écharde » qu’ « aiguillon ». Il s’ajoute donc à l’idée de douleur l’idée de ce qui fait avancer.
  • Paul a recours, comme tout croyant, comme nous, à la prière ( à trois reprises dit-il) : et là, c’est l’échec. Sa prière n’est pas exaucée. On peut imaginer sans peine ce que cela signifie pour un apôtre comme Paul, dont la prière a une grande efficacité.  Sans nul doute au départ, une grande déception et de l’incompréhension : pourquoi Seigneur ? Mais sa prière a été entendue, car il y a une réponse. Voici un enseignement précieux pour nous : ne confondons pas écoute et exaucement. La prière sincère est toujours entendue. L’exaucement dépend de Dieu seul ( par Jésus). Nous ne pouvons pas juger ni même vraiment comprendre cela. Il faut accepter la différence infranchissable entre Dieu et nous. Esaïe 55 : 8 et 9 :

 

« :8  Car mes pensées ne sont pas vos pensées, Et vos voies ne sont pas mes voies, —Oracle de l’Éternel. 

9  Autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, Autant mes voies sont élevées au-dessus de vos voies Et mes pensées au-dessus de vos pensées. »

 

  • La réponse du Seigneur est précise, adaptée et argumentée :

1 . Il répond vraiment sur le sujet, qui est la faiblesse (ici physique). Ce n’est pas un propos général : c’est la réponse attendue à une requête bien formulée. Prions précisément et non en termes vagues, et sachons attendre et entendre une réponse tout aussi précise.

2 . Réponse adaptée : Le Seigneur lui dit pourquoi il ne le délivre pas : « Ma grâce te suffit. » Paul a déjà tout reçu dans le salut par grâce, qui est au-dessus de toutes choses. Le Seigneur l’appelle à revenir à la source, à ne pas inverser la hiérarchie des faits, ce qui est le propre de la chair et de l’humain, soumis à toutes ses limitations. La réponse invite à s’élever au-dessus de l’humain par l’Esprit, amis sans arrêter le combat et ôter l’écharde.

3 . Réponse argumentée : « …car  ma puissance s’accomplit dans la faiblesse. » Ce que Paul traduira ailleurs par des formules-chocs : « les choses folles du monde », pour désigner les croyants (1 Corinthiens 1 :27 : «   Mais Dieu a choisi les choses folles du monde pour confondre les sages; Dieu a choisi les choses faibles du monde pour confondre les fortes; ») ; ailleurs il parle de « balayures du monde » : « 1 Corinthiens 4:13  calomniés, nous parlons avec bonté; nous sommes devenus comme les balayures du monde, le rebut de tous, jusqu’à maintenant. ».  Le but est d’éviter l’orgueil (verset 7), occasion de chute (skandalon) de l’homme, donc de « se glorifier ». Paul va alors formuler de sublime paradoxe du verset 10 b :

« en effet quand je suis faible, c’est alors que je suis fort. »

 

Comment cela est-il possible ?

 

 

Les faiblesse, les limites et la force

 

 

Reprenons maintenant les versets 8 à 10 du chapitre 4 lus précédemment :

 

« 8 ¶ Nous sommes pressés de toute manière, mais non écrasés; désemparés, mais non désespérés; 

9  persécutés, mais non abandonnés; abattus, mais non perdus; 

10                nous portons toujours avec nous dans notre corps la mort de Jésus, afin que la vie de Jésus se manifeste dans notre corps. »

 

Chaque membre de phrase obéit à la même construction : la faiblesse et sa manifestation, puis la limite. Nous avons là quatre exemples qui constituent une progression pensée par l’apôtre.

 

  1. « pressés mais non écrasés ». L’apôtre nous parle ici de la résistance qui nous est donnée, qui nous empêche de céder, de manière surnaturelle, par l’effet de la grâce. Chaque couple suivant procède de la même source : le sacrifice et la résurrection de Jésus.
  2. « Désemparés mais pas désespérés ». ici c’est de l’espérance dont il est question. Nous pouvons ne plus savoir où nous en sommes, mais l’espérance demeure, indestructible.
  3. « Persécutés mais pas abandonnées ». La fidélité de Dieu ne nous fait jamais défaut. Nous sommes toujours accompagnés par Dieu et aussi par les frères et sœurs, concrètement ou par la prière.
  4. « Abattus mais pas perdus ». Le salut demeure par-delà les défaites. La grâce nous suffit et surpasse toute épreuve, ce qui ne signifie nullement que nous ne sommes pas tristes, malheureux ou dépressifs parfois.

 

Les épreuves décrites sont très dures mais pas extrêmes.

 

1 Corinthiens 10 : 13 nous dit pourquoi ; c’est encore Paul qui nous l’enseigne, sans nul doute par son expérience personnelle/

 

« 13  Aucune tentation ne vous est survenue qui n’ait été humaine; Dieu est fidèle et ne permettra pas que vous soyez tentés au-delà de vos forces;  mais avec la tentation, il donnera aussi le moyen d’en sortir, pour que vous puissiez la supporter. »

 

L’épreuve ne saurait nous anéantir car dans la grâce du salut résident la résistance au mal, l’espérance de la foi, la fidélité de la présence de Dieu et le salut qui donne sens à nos vies. Rien ne peut nous priver de cela.

 

Romains 8 :38-39 :

 

« 38  Car je suis persuadé que ni la mort, ni la vie, ni les anges, ni les dominations, ni le présent, ni l’avenir, 

39  ni les puissances, ni les êtres d’en-haut, ni ceux d’en-bas, ni aucune autre créature ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu en Christ-Jésus notre Seigneur. »

 

Conclusion :

 

L’éloge jusqu’à la glorification de nos faiblesses n’est pas :

  • de la fausse modestie à connotation religieuse (sorte d’hypocrisie onctueuse)
  • un renoncement au combat
  • une excuse pour nos fautes (ou péchés)
  • un apitoiement sur nous-mêmes

 

Bien comprise, elle est une attitude de soumission intelligente à Dieu qui permet alors toute la manifestation de sa puissance. Alors nous pouvons dire, avec Paul :

 

« Je me glorifie donc bien volontiers de mes faiblesses afin que la puissance du Christ repose sur moi » – verset 9 du chapitre 12 de la seconde lettre aux Corinthiens.

 

 

Jean-Michel Dauriac – Août 2016

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Trois cantiques classiques étudiés pour leur message évangélique

première partie du culte du 7 août 2016 à Pessac

 

 

 

Chant 1 : Dieu tout-puissant 58 ATG

 


Dieu tout-puissant, quand mon cœur considère

Tout l’univers créé par ton pouvoir :

Le ciel d’azur, les éclairs, le tonnerre,

Le clair matin ou les ombres du soir.

 

De tout mon être alors s’élève un chant :

Dieu tout-puissant, que tu es grand !

De tout mon être alors s’élève un chant :

Dieu tout-puissant, que tu es grand !

 

Quand par les bois ou la forêt profonde

J’erre et j’entends tous les oiseaux chanter,

Quand sur les monts la source avec son onde

Livre au zéphyr son chant doux et léger.

 

Mais quand je songe, ô sublime mystère !

Qu’un Dieu si grand a pu penser à moi,

Que son cher Fils est devenu mon frère

Et que je suis héritier du grand Roi.

 

Tu créas l’arbre et le buisson d’épines

Pour la couronne et le bois de la croix ;

Car ta pensée éternelle et divine,

C’était d’offrir Jésus ton Fils pour moi.

 

Quand mon Sauveur, éclatant de lumière,

Se lèvera de son trône éternel,

Et que, laissant les douleurs de la terre,

Je pourrai voir les splendeurs de ton ciel.


 

 

Le culte que nous rendons à Dieu ce matin est celui d’un peuple racheté face à son créateur. Ce chant est une belle expression classique de notre foi. Reprenons les paroles de ce chant.

 

Il contient un résumé populaire de ce qu’est le christianisme. Le schéma est répétitif, comme souvent dans les chansons ou les cantiques. Le couplet expose un moment de vie ou de pensée et le refrain tire la conclusion spirituelle.

 

Couplet 1 : L’univers, la Terre dans le Cosmos et les éléments sont contemplés avec admiration comme preuve d’un ordre du monde, ce qui amène à célébrer la grandeur de Dieu dans le refrain 1 qui est centré sur la grandeur de Dieu.

 

Couplet 2 : une sorte de zoom avant sur la nature, l’oiseau, la source et le vent. On dirait du J .J. Rousseau. La conclusion est la répétition du refrain 1 sur la grandeur de Dieu.

 

Les deux premiers couplets s’inclinent devant l’évidence de la création divine. Ce qui se retrouve dans un texte biblique célèbre en Romains 1 :19-20 :

 

« 19 ¶ car ce qu’on peut connaître de Dieu est manifeste pour eux, car Dieu le leur a manifesté. 

20  En effet, les (perfections) invisibles de Dieu, sa puissance éternelle et sa divinité, se voient fort bien depuis la création du monde, quand on les considère dans ses ouvrages. »

 

Couplet 3 : le mystère sublime du Christ, qui passe par son incarnation, c’est-à-dire sa venue en chair comme nous et qui le fait devenir mon frère, notre frère : Jésus le dit lui-même dans les Evangiles .

 

Luc 8:21  « Mais il répondit: Ma mère et mes frères, ce sont ceux qui écoutent la parole de Dieu, et qui la mettent en pratique. »

 

Nous sommes donc devenus, comme Jésus, notre frères, héritiers de Dieu et de son royaume. Ephésiens 1 : 3 à 8 – 13-14.

 

« 3 ¶ Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus-Christ, qui nous a bénis de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes en Christ. 

4  En lui, Dieu nous a élus avant la fondation du monde, pour que nous soyons saints et sans défaut devant lui. Dans son amour, 

5  il nous a prédestinés par Jésus-Christ à être adoptés, selon le dessein bienveillant de sa volonté, 

6  pour célébrer la gloire de sa grâce qu’il nous a accordée en son bien-aimé. 

7  En lui, nous avons la rédemption par son sang, le pardon des péchés selon la richesse de sa grâce

8        que Dieu a répandue abondamment sur nous en toute sagesse et intelligence.  …]

13  En lui, vous aussi, après avoir entendu la parole de la vérité, l’Évangile de votre salut, en lui, vous avez cru et vous avez été scellés du Saint-Esprit qui avait été promis

14  et qui constitue le gage de notre héritage, en vue de la rédemption de ceux que Dieu s’est acquis pour célébrer sa gloire. »

 

le refrain change alors et devient une louange à la bonté de Dieu (voir paroles dans ATG) pour les refrains 3 et 4.

 

Couplet 4 : la résurrection, l’enlèvement de l’église ou le passage en l’au-delà, mise en chant simplifiée de l’Apocalypse de Jean ou des propos de Paul dans la première épitre de Paul aux Thessaloniciens.

 

Apocalypse 22 :3 à 5 : « 3  Il n’y aura plus d’anathème. Le trône de Dieu et de l’Agneau sera dans la ville. Ses serviteurs le serviront

4  et verront sa face, et son nom sera sur leurs fronts. 

5  La nuit ne sera plus, et ils n’auront besoin ni de la lumière d’une lampe,  ni de la lumière du soleil, parce que le Seigneur Dieu les éclairera. Et ils règneront aux siècles des siècles. »

 

1 Thessaloniciens 4 : 15 à 17 : « 15  Voici, en effet, ce que nous vous déclarons, d’après une parole du Seigneur: nous les vivants, restés pour l’avènement du Seigneur, nous ne devancerons pas ceux qui se sont endormis. 

16  Car le Seigneur lui-même, à un signal donné, à la voix d’un archange, au son de la trompette de Dieu, descendra du ciel, et les morts en Christ ressusciteront en premier lieu. 

17                Ensuite, nous les vivants, qui serons restés, nous serons enlevés ensemble avec eux dans les nuées, à la rencontre du Seigneur dans les airs, et ainsi nous serons toujours avec le Seigneur. »

 

La bonté de Dieu est alors célébrée in situ, « dans son divin séjour » et c’est l’amour de Dieu qui clôt la version originale du chant, et non plus la puissance. Ce qui nous sauve est l’amour de Dieu, en aucun cas sa puissance.

 

Nous avons donc dans ce chant un résumé de l’histoire humaine face au dessein de Dieu. Qui ne peut s’accomplir que par la venue de Jésus ;

 

Chant 2 – Attaché à la Croix pour moi 127 JEM

 


Quel Sauveur merveilleux je possède !

Il s’est sacrifié pour moi

Et sa vie innocente, il cède

Pour mourir sur l’infâme bois.

Attaché à la croix pour moi,

Attaché à la croix pour moi,

Il a pris mon péché,

Il m’a délivré,

Attaché à la croix pour moi.

 

Il renonce à la gloire céleste

Pour le plan rédempteur de Dieu.

L’apparence est la plus modeste,

Ô quel prix pour me rendre heureux.

 

Maltraité, innocent, pour ma vie,

Pour mes iniquités, brisé

Et chargé de mes maladies,

Il mourut pour guérir, sauver.

 

Le salut accompli pour ses frères,

Mon Sauveur se rendit au ciel.

Il revient! Ô profond mystère,

Mon bonheur sera éternel.


 

 

Là encore, un vrai petit scénario de l’Evangile.

 

Couplet 1 : nous sommes comme les disciples au Golgotha ; il est mort sur la croix, sur l’ »infâme bois ». ils ne comprennent rien, comme les disciples d’Emmaüs.

 

Luc 24 : 18 à 21 : « L’un d’eux, nommé Cléopas, lui répondit: Es-tu le seul qui séjourne à Jérusalem et ne sache pas ce qui s’y est produit ces jours-ci? 

19  Quoi? leur dit-il. Ils lui répondirent: Ce qui s’est produit au sujet de Jésus de Nazareth, qui était un prophète puissant en oeuvres et en paroles devant Dieu et devant tout le peuple, 

20  et comment nos principaux sacrificateurs et nos chefs l’ont livré pour être condamné à mort et l’ont crucifié. 

21                Nous espérions que ce serait lui qui délivrerait Israël, mais avec tout cela, voici le troisième jour que ces événements se sont produits. » 

 

Le refrain célèbre le rachat de nos vies.

 

Couplet 2 : La venue du Fils de Dieu est présentée en 4 vers seulement. L’essentiel est dit : Jésus-Christ renonce à son statut céleste. Ce que Paul dit autrement :

 

Philippiens 2 : 6 à 8 : « 5  Ayez en vous la pensée qui était en Christ-Jésus, 

6  lui dont la condition était celle de Dieu, il n’a pas estimé comme une proie à arracher d’être égal avec Dieu, 

7  mais il s’est dépouillé lui-même, en prenant la condition d’esclave, en devenant semblable aux hommes; après s’être trouvé dans la situation d’un homme, 

8                    il s’est humilié lui-même en devenant obéissant jusqu’à la mort, la mort sur la croix. »

 

Il devient un homme du peuple, à l’apparence des plus modestes.

 

Esaïe 53 : 2 : «  Il s’est élevé devant lui comme un rejeton, Comme une racine qui sort d’une terre assoiffée; Il n’avait ni apparence, ni éclat Pour que nous le regardions, Et son aspect n’avait rien pour nous attirer. »

 

Couplet 3 : la mise à mort de Jésus et sa signification pour un chrétien .

 

Esaïe 53 : 4 & 5 : «  Certes, ce sont nos souffrances qu’il a portées, C’est de nos douleurs qu’il s’est chargé; Et nous, nous l’avons considéré comme atteint d’une plaie; Comme frappé par Dieu et humilié. 

5                    Mais il était transpercé à cause de nos crimes, Écrasé à cause de nos fautes; Le châtiment qui nous donne la paix est (tombé) sur lui, Et c’est pas ses meurtrissures que nous sommes guéris. »

 

Le sens de la mort est alors éclairé : il s’agit de guérir et sauver, les mots même qu’emploie le prophète de l’Ancien Testament.

 

Couplet 4 : l’Ascension et la Parousie

 

Ce couplet nous décrit deux manifestations de la glorification de Jésus.

 

Marc 16 :19-20 : « 19  Le Seigneur, après leur avoir parlé, fut enlevé au ciel et il s’assit à la droite de Dieu. 

20                Et ils s’en allèrent prêcher partout. Le Seigneur travaillait avec eux et confirmait la parole par les signes qui l’accompagnaient. »

 

Matthieu 24 : 36-39 : « 36  Pour ce qui est du jour et de l’heure, personne ne les connaît, ni les anges des cieux, ni le Fils, mais le Père seul. 

37  Comme aux jours de Noé ainsi en sera-t-il à l’avènement du Fils de l’homme. 

38  Car, dans les jours qui précédèrent le déluge, les hommes mangeaient et buvaient, se mariaient et mariaient leurs enfants, jusqu’au jour où Noé entra dans l’arche; 

39                et ils ne se doutèrent de rien, jusqu’à ce que le déluge vienne et les emporte tous; il en sera de même à l’avènement du Fils de l’homme. »

Nous voyons donc ici qu’un chant simple peut être un concentré d’Evangile et nous comprenons mieux que des hommes et des femmes se soient convertis à l’écoute d’un simple cantique.

 

Ceci doit aussi nous inciter à veiller sur la qualité de nos chants, à mélanger intelligemment chants « lourds » et « légers », pour exprimer simplement notre joie, ce que nous allons faire pour finir cette première partie, après l’analyse d’un dernier exemple, peut-être le plus célèbre.

 

Chant 3 : A toi la Gloire – 1 ATG

 


À toi la gloire, ô ressuscité !

À toi la victoire pour l’éternité.

 

Brillant de lumière, l’ange est descendu,

Il roule la pierre du tombeau vaincu.

 

Vois-le paraître :

C’est lui, c’est Jésus.

Ton sauveur ton maître,

Oh ! ne doute plus.

Sois dans l’allégresse peuple du Seigneur

Et redis sans cesse que Christ est vainqueur.

 

Craindrais-je encore ?

Il vit à jamais,

Celui que j’adore,

Le Prince de paix.

Il est ma victoire, mon puissant soutien,

Ma vie et ma gloire, non, je ne crains rien.


 

Ce chant est un chant de triomphe, tiré du « Messie » de Georg-Friedrich Haendel, compositeur anglo-saxon du XVII ème siècle, strict contemporain de J.S Bach. Il célèbre l’inversion de la logique ordinaire. La mort est d’habitude la défaite finale et totale de l’homme.

 

Couplet 1 : Où est la victoire de la mort ?

 

1 Corinthiens 15 :55-57 : « 55  O mort, où est ta victoire? O mort, où est ton aiguillon? 

56  L’aiguillon de la mort, c’est le péché; et la puissance du péché, c’est la loi. 

57                Mais grâces soient rendues à Dieu, qui nous donne la victoire par notre Seigneur Jésus-Christ! »

Retenez le mot aiguillon, il reviendra tout à l’heure !

 

Couplet 2 : C’est la célébration de la victoire. Ici, c’est une victoire collective, pour le « peuple du Seigneur ». Nous retrouvons ici les accents des Psaumes.

 

Couplet 3 : La victoire devient alors personnelle : la crainte est bannie. Dieu apparaît avec des attributs importants ; il est victoire, soutien, vie et gloire. Retenons aussi ces mots, pour la suite de notre culte

 

Ce que nous venons de voir dans ces cantiques classiques produit en nous une vraie joie qui nous pousse à célébrer Dieu par le chant.

 

JM Dauriac – août 2016

 

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