Skip to content →

Catégorie : religion et spiritualité

recension et essais sur des livres portant sur toutes les question spirituelles, métaphysiques et religieuses

Petit livre de sagesse monastique – Henri Brunel

Paris, La Table Ronde, collection Les petits livres de Sagesse, 1999.

Le marché du livre est tellement vaste aujourd’hui que même un grand lecteur et passionné ne peut connaître toutes les collections, y compris dans ses domaines de prédilection. Il faut donc accepter soit de demeurer dans l’ignorance soit de s‘en remettre au hasard. Fréquentant beaucoup les sites de bouquinistes en ligne, y compris les ressourceries spécialisées et les gros sites du genre, je suis maintenant le destinataire de certains mails de promotion, notamment lors des soldes destinés à dégager du stock et de la place. C’est ainsi que j’ai acquis ce petit ouvrage, dans un lot de livres de spiritualité très varié. Et, ce faisant, j’ai découvert qu’il y avait eu une collection de petits ouvrages appelée Les petits livres de la sagesse chez l’éditeur La Table Ronde. C’était à la fin du XXe siècle et au tout début du présent siècle. Les thèmes abordés étaient très hétéroclites allant des Paroles de fées aux livres bouddhistes, en passant par divers aspects de la mystique catholique.

Ce volume, court, comme tous ceux de la collection (135 pages) présente les grands ordres monastiques historiques, en l’occurrence ici les Chartreux, les Bénédictins et les Cisterciens-Trappistes. L’auteur est un chrétien catholique fervent et fidèle qui ne cache pas son admiration pour les sujets de son ouvrage.

Le moine est, depuis l’origine, hors du monde et limité au sein de ce qu’on nomme « la clôture » du monastère. Car il s’agit ici des moines cénobites et semi ermites, ce qui exclut un certain nombre d’ordres bien connus, comme les Dominicains ou les Franciscains.  Il s’agit du versant le plus radical du monachisme, sans doute né en Egypte au IV siècle et répandu ensuite dans toute la chrétienté (qui n’a pas le monopole de cette pratique). Il faut bien reconnaître que l’imaginaire populaire actuel sur les moines est très limité et caricatural : on songe à une publicité télévisée sur le fromage « Chaussée aux moines » ou aux illustrations des divers camemberts. Le moine est donc décrit comme un ripailleur, buveur et au teint très coloré. Or, ceci est exactement aux antipodes de ce que ce livre nous permet d‘apprendre sur la vie monastique. L’auteur, qui a séjourné chez tous les ordres monastiques dont il traite, nous donne le régime ordinaire des monastères. On n’y fait pas du tout bombance ! Et surtout, les repas ne sont pas des fiestas bruyantes et animées. Le plus strict est chez les Chartreux, qui mangent dans leur cellule et très frugalement. Même chez les Bénédictins ou Trappistes, le repas est moment d’écoute de la lecture de la parole ou de quelque œuvre édifiante (chez les Bénédictins, on relit sans cesse, par morceaux, la Règle du fondateur, Saint-Benoît). D’où vient donc cette réputation de noceurs qu’ont les moines ? Sans nul doute de leurs adversaires et des excès médiévaux de certains religieux. Le cliché s’est installé et il a la vie dure.

Non seulement le moine ne fait pas ripaille, mais il mène une vie extrêmement monotone, très répétitive. H. Brunel donne, pour chaque ordre, l’emploi de temps de la journée. Le lecteur pourra, à juste titre trouver ce rythme insoutenable, tant les prières et offices sont nombreux, le record appartenant aux Chartreux, dont la vie semble, vue de l’extérieur être un enfer ! Si le rythme est un peu assoupli chez les Bénédictins et Trappistes (ils peuvent avoir une vraie nuit, courte, mais suffisante), il y a de quoi faire peur à un homme du XXIe siècle. Et pourtant, si nous prenions la peine de mettre sur le papier nos propres emplois du temps, nous serions sans doute assez surpris de leur densité ! C’est donc bien la nature du programme plus que son rythme qui est en cause. Nous vivons dans un monde tellement éloigné du monde spirituel qu’une vie organisée par lui nous semble un carcan insupportable. Le moine a fait le choix, très réfléchi – car il dispose d’un long temps avant de s’engager définitivement – d’une vie centrée sur Dieu. Personne ne l’y a contraint et personne ne l’y maintient de force. Voici une chose très difficile à saisir pour la grande majorité des gens. Le moine a fait le choix de servir Dieu à plein temps, de lui offrir sa vie entière. Nous ne sommes pas scandalisés par des stars ou des chefs d’entreprise qui vouent leur existence à leur travail ou à leur passion, mais nous avons du mal à accepter le choix du moine. Ceci, en fait, nous parle de nous-mêmes , de l’engrenage de nos vies dans le matérialisme le plus stérile, de la perte de toute vie spirituelle digne de ce nom.

Car c’est un des mérites de ce petit ouvrage de nous donner à connaître la vie spirituelle des moines et la spécificité de chaque spiritualité monastique. Il y a quantité de chemins qui mènent à Dieu, il est donc normal qu’il y ait diversité des voies monastiques. Le chemin le plus abrupt est celui de la spiritualité des Chartreux. Ce sont des ermites, qui vivent ensemble leur solitude, sans un mot et en évitant les rassemblements superflus. Il faut une âme forte pour devenir Chartreux. Cette voie n’est vraiment pas accessible à n’importe qui. Les voies Bénédictines ou Cisterciennes rénovées par la Trappe sont plus douces, bien que très encadrées. Les Bénédictins et les Trappistes vivent assez intensément le travail, qui est une part de leur vocation. Les Bénédictins ont une spiritualité qui peut se résumer en trois mots forts : la foi, l’humilité et l’obéissance. Vertus évangéliques par excellence, qui sont ici poussées à leur tension maximale. Chez les Trappistes, qui sont des Bénédictins réformés, le travail manuel est un moyen important de sanctification. Pour tous ces moines, le but est de se dépouiller au maximum de la nature charnelle pour vivre la communion avec Dieu. La clôture du monastère leur permet de ne viser que ce but. Sont-ils pour autant inutiles au monde extérieur ? Sûrement pas, car ils prient sans cesse pour le monde et, chez les chrétiens, la prière est le moyen par excellence d’agir pour le salut du monde. Par leur travail, ils produisent des marchandises qu’ils vendent pour permettre la vie de la communauté. C’est aussi un moyen de rencontrer le monde séculier. Si le moine vit hors de la société médiatique, il ne vit pas dans l’autisme ; il évite simplement cette surinformation narcotique, qui n’est qu’un aspect de la propagande mondaine. Si nous nous soumettons à l’expérience de vivre quelques jours sans internet et sans téléphone portable, nous oublions très vite l’agitation du monde et ses fausses urgences. Mais, nous y retournons très vite, soit par obligation, soit par ignorance d’une autre voie, soit par peur d’un vide qui nous obligerait à l’introspection. Le moine, lui, a tout son temps. L’introspection, il la vit au quotidien, mais dans la perspective évangélique de l’humilité et de la quête du Royaume de Dieu.

Ce petit livre a une double fonction : la première est évidente, essentielle, il s’agit de faire connaître les ordres monastiques catholiques sous leur vrai jour. La seconde est beaucoup moins évidente, mais elle ne peut manquer d’exister : il s’agit de nous questionner sur notre propre existence, sur ce qui la porte et vers quoi elle nous porte. A titre personnel, je pense que je ne serais pas capable d’être moine dans un de ces ordres réguliers. Mais les connaître, pouvoir un jour rencontrer des moines, comme cela m’est arrivé plusieurs fois, échanger sur la façon de vivre la foi, tout cela est d’un apport capital pour un laïc qui souhaite le rester, tout en visant une vraie vie spirituelle et mystique.

J’ai dévoré ce petit ouvrage avec un grand plaisir. Je ne peux que le conseiller, sachant toutefois qu’il faut avoir un minimum de soif spirituelle et de curiosité sur ce qui nous est étranger pour aller vers lui. On n’y découvrira pas des surhommes, mais des croyants qui ont choisi de se vouer à leur vie de foi, ce qui ne signifie évidemment pas qu’ils ne connaissent pas le doute ni l’angoisse, qu’ils ne peuvent souffrir dans leur vocation. Ils sont simplement là comme des témoins d’un engagement radical au service du Christ. On peut les admirer sans els comprendre ou les approuver, mais on ne saurait les ignorer ou les caricaturer.

Jean-Michel Dauriac – Les Bordes, juin 2024.

Leave a Comment

La joie de croire – Madeleine Delbrêl

– Livre de vie – Editions du Seuil – 1995 (1re édition 1968)

Qui connaît Madeleine Delbrêl (1904-1964) en dehors des milieux catholiques sociaux ? Personne.

Tout d’abord, parce qu’elle est morte il y a exactement soixante ans (en 1964). Notre époque oublie d’autant plus vite que les médias sont devenus omniprésents et nous surinforment de plus en plus, sans parler de ce cancer métastasé que sont les réseaux (a)sociaux. Le temps s’accélère incroyablement et la mémoire se rétracte. Le Général de Gaulle n’est plus qu’un nom d’avenue, Bonaparte un fantôme, Rabelais un extraterrestre. L’oubli collectif engloutit les grands comme les humbles. C’est pour cela que j’ai entrepris également de faire une recension complète des romans de Gilbert Cesbron, qui fut en son temps un écrivain très célèbre et qui est totalement inconnu de nos jours, sauf par les plus vieux lecteurs encore vivants.

Ensuite parce qu’elle appartient à un monde qui s’estompe, celui du catholicisme social des années 1930-1960. Bien sûr, il existe encore un catholicisme social, mais il est sans grand écho dans notre société, malgré les efforts de la presse catholique française. Madeleine Delbrêl est contemporaine de l’Abbé Pierre lançant l’aventure Emmaüs, elle l’est aussi du père Wrezinski créant ATD-Quart Monde. Deux associations qui perdurent, car étroitement liées à la grande pauvreté, qui ne fait que s’accroître. Mais Madeleine D. n’a pas laissé une telle structure, qui puisse garder sa mémoire. Citons cependant l’Association Madeleine Delbrêl, qui entretient la flamme, mais avec une audience réduite à son monde catholique.

Enfin, parce cette femme laisse un héritage écrit important mais exigeant et contextualisé. Il est facile de la relier à l’expansion du communisme français, notamment dans la « ceinture rouge » de Paris, puisque c’est à Ivry, grand bastion communiste, qu’elle a vécu et exercé son ministère laïc. Elle aurait donc perdu son actualité avec l’effondrement du communisme. Rien de plus faux, notamment pour le recueil que je présente aujourd’hui. Le lecteur y trouvera très peu de références au marxisme et aux marxistes, mais bien plus aux athées et aux pauvres, qui sont très actuels, c’est le moins que l’on puisse dire. Mais ces textes posent un haut niveau d’exigence dans la « charité » (au sens ancien, synonyme d’amour) et la vie chrétienne. Et, phénomène très inquiétant, tout ce qui est exigeant est aujourd’hui fort mal perçu. On y voit soit de l’intégrisme, soit du sectarisme, soit de l’élitisme ou du totalitarisme (ah ! ces horribles mots en –isme !). L’exigence, surtout morale, comme c’est le cas ici, semble dangereuse : elle s’attaque à l’individualisme égoïste et hédoniste, devenu la norme implicite de nos sociétés occidentales. Nos librairies vendent à pleins rayons des livres de « développement personnel », mais tous vont dans le sens d’une autoréalisation narcissique. Tout le contraire de ce que nous dit La joie de croire.

Madeleine Delbrêl jeune

Ce livre a pourtant tout pour devenir un livre « de chevet ». J’entends par là de ceux que nous reprenons régulièrement et dont il nous est plaisant, nécessaire et utile de relire régulièrement quelques pages. Il peut ainsi rejoindre de grands textes qui nous aident à mieux vivre, comme Les Pensées de Pascal, les Actuelles d’Albert camus ou les Propos d’Alain, pour ne citer que quelques exemples.

D’abord, par sa structure. Avouons-le, il est plus facile d’avoir pour livre de chevet Citadelle de Saint-Exupéry que Notre-Dame de Paris de Victor Hugo, car celui-ci est un gros roman, alors que celui-là est un recueil de courts morceaux, tout à fait comparables aux Pensées pascaliennes. Le livre de Madeleine Delbrêl est une anthologie de textes divers qu’elle a produits au long de sa vie militante.  Ils ont été regroupés par sous-ensembles thématiques et sont accompagnés d’un index fort utile, qui permet de retrouver un sujet dans ses différents lieux : par exemple le thème de la Douceur ou celui du Combat chrétien.

Disons-le clairement, bien que ce soit évident : ce livre s’adresse à des chrétiens engagés (que j’oppose ici aux « sociologiques », qui vont à la Messe de Minuit, parce que « c’est joli »), de quelque chapelle se réclamant du Christ qu’ils soient. Bien sûr, Madeleine Delbrêl est profondément catholique et très attachée à l’Église , avec toutes ses composantes (du pape aux saints, en passant par les curés et les laïcs). Cela pourra hérisser le poil des protestants sectaires qui ont perdu de vue que l’attachement à son Église est une preuve de vie chrétienne, mais il n’en demeure pas moins que le désir du Christ est l’unité des disciples et que, dans cette optique, l’Église Catholique romaine est un partenaire majeur. Il appartient au lecteur de laisser de côté ce qui le dérange dans les propos de l’auteure. Pour ma part, je dois avouer que je n’ai pas eu beaucoup de choses à écarter. Celui qui fera l’effort initial d’entrer dans ce livre avec sincérité et fraternité en ressortira meilleur.

Le livre présente donc des regroupements thématiques, eux-mêmes subdivisés en sous-thèmes, ce qui permet, à partir de la table des matières d’aller directement vers un thème de son choix. Ce que je ferai dans mes prochaines lectures, après l’avoir lu séquentiellement. En effet, il est indéniable que le contenu spirituel de ces textes est de grande valeur et que sa lecture et sa méditation seront fort utiles aux prédicateurs, aux animateurs de groupes bibliques ou de prière, en sus de tout lecteur à la recherche de nourritures spirituelle authentique.

Prenons un exemple de thèmes, avec ses sous-thèmes. Le livre s’ouvre sur L’Évangile est le livre de notre vie, qui offre cinq textes : Le Livre du Seigneur, Pourquoi nous aimons le Père de Foucauld, Joies venues de la montagne, l’amour de Dieu traduit et Une voix qui criait l’Évangile. Dès le début, la Parole du Seigneur est mise au centre. Madeleine D. est profondément évangélique, au plus beau sens du terme. Je le dis avec d’autant plus de certitude que je suis moi-même issu du milieu protestant à tendance évangélique. Entre ce qu’elle dit et ce que j’ai appris et médité toute ma vie, il n’y a pas un iota de divergence. Là est la véritable unité, celle que fait la Parole du Christ. Madeleine a compris que cette parole est Esprit et Vie et elle n’a jamais séparé la foi de l’action. Mais pour agir comme elle l’a fait, en témoin dans une ville communiste et auprès des plus pauvres, il faut une vie nourrie quotidiennement du pain de vie. J’ai senti, tout au long de cette lecture, l’authenticité de cette vie nourrie. On ne peut pas tricher sur ces choses-là. J’ai été particulièrement touché par le cinquième thème, sobrement titré La prière. Certes, elle aborde la prière par un aspect liturgique, mais très vite elle en vient à une vie plus personnelle. Les sujets qu’elle aborde sont d’une grande actualité intemporelle : quel temps consacrer à la prière dans notre société de production ? Comment dégager, tout au long de la journée, sous diverses formes, des moments de rencontre avec Dieu ? Qu’attendre de notre prière ? Tout chrétien s’est un jour posé ces questions ou les a posées à son référent (curé, pasteur, pope, animateur de groupe, diacre…). Parfois la réponse n’a pas été à la hauteur de la demande. Celui qui cherche trouvera ici des éléments de réponse très précis.

Je ne vais pas développer davantage le contenu de ce livre très riche. À vous de le découvrir et de le savourer.

Madeleine Delbrêl au soir de sa vie

Je dois signaler deux autres aspects assez surprenants de ces écrits, qui sont, de facto, des aspects de la personnalité de l’auteure (je suis allé vérifier à des sources autorisées). Tout d’abord, elle est capable de manier l’humour. Ce qui peut surprendre tant le contenu est profond. Mais c’est vraiment très bien ainsi. Car, nos frères juifs nous l’ont appris, Dieu a de l’humour. Soudain, au cours d’un développement, elle se lance dans une métaphore vélocipédique ou décoche un trait ironique inattendu. Ce n’est jamais gratuit, histoire de « faire un effet ». Cela vient naturellement illustrer le dire. J’ai vu que, dans ses œuvres complètes, un volume était d’ailleurs consacré à l’humour. Le second aspect est celui de la poésie. Quelques textes ont une vraie forme poétique, comme Nos déserts (p.110 de mon édition) ou Liturgie des sans-office (P. 229). Sa prose est naturellement poétique, bien qu’elle traite de sujets souvent graves et concrets. Elle m’a fait songer à une autre femme, écrivain et poète, croyante aussi et aussi méconnue, Marcelle Delpastre, dont les textes sont aussi pour moi des textes de chevet, dans un autre registre. Qu’on me pardonne (c’est ironique !) cette affirmation scandaleuse : je crois que leur nature féminine est ici avantagée par une sensibilité moins castrée que chez les hommes, souvent massacrés dans ce domaine par un virilisme stupide.

Si l’on prend la peine de bien y réfléchir, l’humour et la poésie sont deux armes extrêmement efficaces pour combattre la laideur, la violence, la bêtise, en bref le mal. De plus, ils sont des outils précieux dans l’animation de groupes ou la communication écrite, domaines où Madeleine D. fut experte. Ce ne sont pas des techniques que l’on acquiert ; vous ne pourrez apprendre à personne à manier l’humour et l’autodérision, c’est une ligne de démarcation naturelle innée. Voir poétiquement le monde est la vie est un cadeau fait à certains, que le labeur ne peut pas atteindre, même en imitant.

Vous aurez bien compris en me lisant combien j’ai aimé et aimerai longtemps ce recueil. Cela faisait des années que je croisais des extraits de texte de Madeleine Delbrêl dans la presse catholique que je lis pas mal. J’étais à chaque fois marqué par l’écho profond qu’ils trouvaient en moi. L’achat de deux de ses recueils m’a conforté dans cette communion de pensée. Ajoutons que nous avons, Madeleine et moi, un autre point commun : le père Charles de Foucauld. J’ai vécu mon enfance dans une ville socialiste historique de la banlieue bordelaise où les noms de rues célébraient l‘histoire de ce mouvement et la résistance (Roger Salengro, Édouard Vaillant, Jean Jaurès…). Mais j’habitais rue Charles de Foucauld ! Très tôt je me suis intéressé au personnage atypique et j’ai toujours eu beaucoup d’attachement pour le « frère universel ». Madeleine revendiquait d’être une disciple de Charles de Foucauld, notamment pas son service aux plus pauvres. Revenu il y a peu vers l’ermite du Hoggar, je me suis encore plus près de lui que dans ma jeunesse, car maintenant je comprenais ses choix spirituels. J’ai retrouvé son écho chez Madeleine Delbrêl.

Précipitez-vous donc chez votre libraire et commandez La joie de croire ! c’est un investissement à très long terme et très productif.

Jean-Michel Dauriac –  Les Bordes – Avril 2024

Leave a Comment

Guide pratique des pères de l’Eglise

Adalbert Hamman  – Desclée de Brouwer, 1967 – 335 pages

Les deux couvertures des éditions du livre

Voici un livre ancien que je recommande vivement, qui se trouve facilement d’occasion sur internet et qui se lit vraiment très aisément.

La connaissance des Pères de l’Eglise est affaire de théologiens et d’historiens, me direz-vous. Et catholiques de surcroît. C’est effectivement la réalité pratique d’aujourd’hui. Ce que l’on nomme la patristique ou patrologie est une spécialité universitaire dont se tiennent éloignés les chrétiens, dont la plupart ignorent même l’existence et le nom. Or, ces textes sont ceux qui constituent, dans le sein de l’Eglise catholique romaine, la Tradition, source dogmatique de même importance que les saintes Ecritures. On comprend donc qu’ils soient décisifs pour cette Eglise et son histoire doctrinale. Evidemment, les protestants rejettent la Tradition comme écriture inspirée, et en restent au Sola Scriptura, une seule Ecriture, la Bible. Dans la pratique, la Faculté de théologie protestante de Strasbourg comporte un département et une revue de patristique. Car on ne peut ignorer ces écrits, souvent seules sources de renseignements sur l’Eglise des premiers siècles. Mais dans le cycle complet d’études théologiques, il n’y a aucun enseignement spécifique consacrés aux Pères de l’Eglise. Ils sont approchés par le biais de l’histoire de l’Eglise ou par la dogmatique. Ce qui laisse la plupart des diplômés (et donc des futurs pasteurs ) ignorants de ce patrimoine.

C’est pourquoi je me permets de conseiller absolument la lecture de cet ouvrage, et particulièrement à mes lecteurs protestants. Il s’agit d’une belle introduction à la patrologie, et un excellent éclairage sur une certaine histoire de l’Eglise des premiers siècles.

Les Pères de l’Eglise sont des auteurs que le pape Jean-Paul II a appelé ceux « qui, par la force de leur foi, par l’élévation et la fécondité de leur doctrine ont donné à l’Église une vigueur nouvelle et un nouvel essor. Ils sont vraiment les ‘Pères’ de l’Église car c’est d’eux, par l’Évangile, qu’elle a reçu la vie. Ils sont également les bâtisseurs puisque, sur la base de l’unique fondement posé par les apôtres, (……) ils ont édifié les premières structures de l’Église de Dieu. » L’Eglise n’en a pas dressé une liste définitive, mais il s’agit plutôt d’un consensus sur le temps long. Il existe des différences selon l’Eglise catholique ou orthodoxe. Je joins en fin de cette article une liste chronologique emprunté à l’article de Wikipédia, « Pères de l’Eglise ».

L’ouvrage du père Hamman est la présentation d’une sélection des Pères les plus importants et les plus incontestables. Il a ainsi choisi vingt auteurs, répartis du IIe au Ve siècle. La méthode est d’offrir une présentation standardisée comprenant l’étude du contexte historique et religieux, la vie de l’homme, puis son œuvre. Chaque présentation se clôt par un texte de cet auteur, occasion de découvrir le style et la pensée.  Chaque chapitre ouvre par une représentation iconographique du personnage et se termine par l’extrait choisi. De nombreuses illustrations sont réparties au fil des pages, en noir et blanc, pour l’essentiel des reproductions d’oeuvres d’art. Le résultat est médiocre, car la résolution des reproductions est faible et les contrastes d’impression mauvais. C’est le mauvais point de ce livre. Pour le reste, il est très bien fait, écrit dans un style alerte, facile à lire et n’abusant pas des termes théologiques abscons qui pourraient désorienter le lecteur lambda. L’auteur a une grande érudition en la matière, c’est très sensible à la lecture. Il a aussi une belle objectivité, notamment quand il décrit le caractère ou le comportement de ces hommes. Il ne se livre pas à un travail hagiographique, mais essaie de rester dans l’humanité de ces auteurs.

Ce livre atteint parfaitement son but. Il donne envie de mieux connaître certains Pères et apporte de bonnes connaissances de base. L’anthologie de textes est également précieuse, car elle aborde des sujets divers et précise certaines pratiques ou croyances de l’Eglise primitive.

Pour toutes ces raisons, je recommande vivement la lecture ce livre, qui peut se lire dans le désordre, auteur par auteur. Il deviendra une référence de la bibliothèque chrétienne de base.

Annexe : liste des Pères de l’Eglise : source : https://fr.wikipedia.org/wiki/P%C3%A8res_de_l%27%C3%89glise

Les Pères présentés dans le livre sont en caractères gras dans la liste ci-dessous.

Les Pères anténicéens (jusqu’en 325)

Articles détaillés : Patristique et Premier concile de Nicée.

Les Pères apostoliques

Les Pères du iie siècle

Les apologètes

La littérature anti-hérétique

Les Pères du iiie siècle

Pères grecs

Pères latins

  • ·                    Tertullien (vers 155 – après 220) (n’a pas fait l’objet du consensus ecclésiastique)
  • ·                    Minucius Félix (né vers 200)
  • ·                    Cyprien de Carthage (vers 200 – 258) ; saint fêté le 16 septembre
  • ·                    Lactance (vers 260 – vers 325), appelé aussi le Cicéron chrétien.

L’âge patristique (325-451)

Pères opposés à l’arianisme

Article connexe : Arianisme.

Pères cappadociens et Jean Chrysostome

Autres pères : 2e, 3e et 4e conciles (ve siècle)

Pères grecs

Pères latins

  • ·                    Jérôme de Stridon – Docteur de l’Église (v. 347 – 420)
  • ·                    Ambroise de Milan, Docteur de l’Église, évêque (v. 340 – 397)
  • ·                    Augustin d’Hippone – Docteur de l’Église, évêque (354 – 430)
  • ·                    Léon le Grand – (  mort en 461)

Pères syriens

Les Pères de tradition chalcédonienne (après 451)

Pères grecs antérieurs à la crise iconoclaste

Pères grecs défenseurs des saintes images

Pères latins

Pères propres à une seule confession

Pères propres à l’Église orthodoxe

Pères propres aux Églises non chalcédoniennes

Pères propres à l’Église de l’Orient

Jean-Michel Dauriac – Décembre 2023

Leave a Comment