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Le Blog à Jean-Mi ! Posts

La fête au jardin à Fresselines (23) : joute oratoire du 26 juillet 2024, Jean-Michel Dauriac et Francis Duchiron

Culture populaire en milieu rural – épisode 3

Voici l’avant-dernier volet de cette petite série d’articles qui fait l’apologie et la défense de la culture populaire à la campagne. Le dernier exemple est celui du village de Fresselines, dans la vallée des peintres, en Creuse. Ce petit bourg d’à peine 800 âmes est le lieu d’une grande activité artistique tout au long de l’année, mais particulièrement en été, quand la Creuse est un peu plus peuplée et que le temps permet des manifestations extérieures. Je ne m’étendrai pas sur le lieu culturel voué au Blues qu’est la P’Artqueterie, je renvoie le lecteur à sa page Facebook (https://www.facebook.com/Lapartqueterie/?locale=fr_FR ) pour découvrir toutes leurs activités, qui drainent un public nombreux. Nous sommes là dans une structure de type salle permanente de spectacle, comme le montre leur site. Ils ont conquis un vaste public au fil du temps et c’est très positif. Je veux centrer cet article sur les initiatives associatives de bénévoles.

Depuis 2015, il existe une Université Libre de Creuse qui tient ses sessions chaque été lors de l’avant-dernier week-end de juillet, du vendredi au dimanche. Je lui consacrerai la dernière de ces chroniques. Il s’agit là d’une offre de réflexion intellectuelle sur notre société et ses problèmes, accompagnée d’une découverte de la Creuse et de moments artistiques conviviaux, le tout gratuitement offert, grâce au travail des bénévoles de l’association organisatrice et des intervenants.

Ce dont je veux vous parler aujourd’hui est une belle idée, liée au cadre naturel superbe de la Creuse. Il s’agit d’une utilisation publique, le temps d’une soirée, des jardins privés de la commune, dont les propriétaires acceptent d’ouvrir leurs portes. Cela se nomme La fête au jardin et se déroule sur environ trois semaines, entre fin juillet et mi-août.

Une belle équipe de bénévoles, comme à Mers sur Indre ou Nouzerines (voir les chroniques précédentes, épisode 1 et épisode 2) rend possible ce petit miracle. Les uns ou les unes préparent des tartes ou des quiches, d’autres installent les chaises et les tables (venues des foyers engagés), certains montent la sono et font la régie technique, d’autres encore accueillent. Tout cela est au service d’un programme mis sous le signe de l’éclectisme, où chacun peut trouver des centres d’intérêt qui lui sont chers ou découvrir de nouveaux chemins. Jetez un coup d’œil sur le programme ci-dessous, vous vous ferez une idée vous-mêmes. Ce mini-festival de l’hortus est la preuve concrète qu’il existe une richesse culturelle accessible, même dans ce que certains considèrent comme le trou le plus perdu de la France (en général on use d’une formule plus scatologique).

La chanson côtoie le cinéma, le théâtre ou le jazz. L’ambiance est au cabaret, avec de petites tables posées dans l’herbe, on sirote sa bière ou son jus de fruits. L’an passé, nous avions été assister à deux spectacles et en étions revenus ravis. J’ignorais alors que je me retrouverais dans la programmation de cette année. L’idée a germé dans un cerveau fresselinois (je ne dénoncerai personne, me réservant pour l’arrivée du fascisme au pouvoir en France !) de proposer une sorte de battle orale à Francis Duchiron et à moi-même. Deux profs bavards qui devraient être capables de parler de tout et n’importe quoi, ce qui est l’essence même du métier de prof, comme chacun le sait ! Et nous avons été assez vaniteux ou inconscients pour accepter !

Et nous voici donc, le vendredi 26 juillet, à 19 h 30, prêts à entrer en scène. Bien sûr, le fait que ce soir-là, à cette heure précise, se déroule la cérémonie inaugurale des JO de Paris, relève du pur hasard. Nous pensons donc que ce sera vite expédié, puisqu’il n’y aura personne. Eh bien, nos espoirs ont été déçus : il y a dans cette commune des gens qui n’aiment pas les JO ! Quelle attitude antipatriotique !

Une vue partielle du public, avant le début du spectacle

Quand nous les avons vus arriver , petit à petit, nous avons compris que nous allions être obligés de faire cette prestation. Il nous restait l’espoir qu’ils partent vite et que le combat cesse faute de combattants. Petit discours de présentation de l’originalité de cette soirée, salutations et remerciements et il faut y aller.

Nous avons voulu, Francis et moi, que ce soit une totale improvisation. Nous ignorons donc tout de ce qui va nous être demandé. La règle du jeu est énoncée : un sujet est tiré au sort par un spectateur (trice), nous avons dix minutes pour épuiser le sujet, puis on passe à un autre sujet. Les sujets ont été préparés par les organisateurs ; nous demandons que le public puisse en ajouter, mais il semble que nous n’ayons pas été très convaincants sur ce point. Nous avons bien prévenu que ce ne serait nullement un débat contradictoire, mais la juxtaposition de nos improvisations, sans nous interdire d’intervenir dans le discours de l’autre.

Les deux artistes au début du show (debouts)…

Puis, un peu après, les mêmes :

Dans cette position, nous pouvons tenir plus longtemps.

Le premier sujet est vertigineux : « Pommes frites ou pommes vapeur ? ». Pour s’échauffer, c’est très bien. Nous avons négocié avec la production le droit à un joker chacun.Juste au cas où nous aurions une panne d’inspiration. Les sujets s’enchaînent et nous sommes de plus en plus dans notre spectacle. «  La beauté de la Creuse », « Les fausses promesses du père Noël », « Sport et compétition », « Compétence et connaissance », « Confiance et croyance »… Nous tenons sans souci les dix minutes, il faut même que la maîtresse des horloges nous bipe parfois pour arrêter. A notre grande déception, les gens ne partent pas ! Au bout d’une heure et demie, nous baissons le rideau, sous un tonnerre d’applaudissements (enfin, c’est fini !). Félicitations polies de certains auditeurs et, plus drôle, demande de revenir l’année prochaine. Bref, les ruraux nous surprendront toujours par leur ouverture d’esprit.

Qui aurait l’idée de proposer, en ville, à deux braves retraités de l’Éducation Nationale, de monter sur scène pour élucubrer de concert. Même pas intermittents du spectacle ! Et ce qui est assez bluffant, c’est que le public suit. Il n’y a pas cette culture blasée de l’urbain gavé de distractions – au demeurant pas toujours de bonne qualité. Ici, on vient découvrir. L’entrée est gratuite, mais on peut participer aux frais. Le cadre des jardins est apaisant et amortit les sons ; pas de mauvaises résonnances ou d’échos trompeurs. La proximité avec le public crée une intimité, renforcée par le soir qui tombe doucement et les vestes légères que l’on jette sur les épaules.

Cet exemple de programme culturel montre qu’il faut savoir inventer des formes adaptées au cadre et mettre en avant l’humain. Chaque jardin qui reçoit raconte l’histoire de ses propriétaires, aucun ne ressemble à un autre. Pendant trois semaines, les mêmes bénévoles vont travailler dur, car les dates se suivent très proches. Des liens vont se tisser entre les spectateurs, les nouveaux seront accueillis… La culture populaire se joindra à l’humanité pour faire vivre une certaine fraternité. C’est donc possible. Bien sûr, tous les habitants ne participent pas, mais la possibilité leur est donnée.

Voici donc encore une pierre ajoutée à l’édifice de la culture populaire en milieu rural.

Jean-Michel Dauriac – Août 2024

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Une vie cachée en Christ

Être chrétien, selon la définition la plus simple consiste à « être disciple du Christ » ou « professer sa foi en Jésus-Christ ». La notion de religion du Christ n’intervient qu’en second lieu, dans un second temps chronologique. Une précision complémentaire apparaît souvent : « qui est baptisé ». Si l’on synthétise tout cela, voici ce que l’on obtient :

« Chrétien : disciple du Christ, qui professe sa foi en Lui, qui est baptisé en son nom et appartient à la religion chrétienne ».

L’un ou l’autre terme peut être discuté, mais les éléments de base sont bien là. Gardons en mémoire ces traits de définition, pour bien saisir le sens profond de la méditation biblique qui suit.

Texte de base : Épitre aux Colossiens, chapitre 3 : 1-4

« 1  Si donc vous êtes ressuscités avec Christ, cherchez les choses d’en haut, où Christ est assis à la droite de Dieu.

2  Attachez-vous aux choses d’en haut, et non à celles qui sont sur la terre.

3  Car vous êtes morts, et votre vie est cachée avec Christ en Dieu.

4  Quand Christ, votre vie, paraîtra, alors vous paraîtrez aussi avec lui dans la gloire. » Version NEG (Nouvelle Édition de Genève)

La version de la TOB introduit une variante intéressante du début du premier verset :

« 1 Du moment que vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez ce qui est en haut, là où se trouve le Christ, assis à la droite de Dieu ; »…

De nos jours, les ministres du Culte, comme les prédicateurs occasionnels, prêchent peu sur ce passage. On le comprend facilement, quand on prend la peine de le lire très attentivement.

Voici un texte qui nous éloigne et nous sépare de la vie ordinaire de la race humaine. Comme tel, nous pourrions facilement le dire antihumaniste ou misanthrope. C’est du moins ce que suggère une lecture plate et rapide. Les mots « mort » et « résurrection » sont des termes très lourds à penser, même, ou peut-être surtout pour un chrétien. Pourtant, se pencher sur ces versets avec application vaut la peine que l’on y prendra.

Morts et ressuscités en Christ

Comme signalé plus haut, ces deux mots-concepts méritent tout notre intérêt. Ils sont à la fois scandaleux et centraux pour la foi chrétienne.

L’adjectif « scandaleux » découle directement d‘un mot grec, skandalon, que le meilleur dictionnaire grec-français définit ainsi : « piège placé sur le chemin, obstacle pour faire tomber ». Où est le scandale pour un chrétien, me direz-vous ? Je suis d’accord avec vous qu’il ne devrait pas y en avoir. Mais, aujourd’hui, au XXIe siècle, ces affirmations basiques de la foi chrétienne sont « occasion de chute » pour de nombreux croyants de toutes les Églises. Le travail de trois siècles d’athéisme a infusé dans toute la population française, même chez les chrétiens, catholiques comme protestants. Combien, aujourd’hui, dans une discussion avec des non-croyants oseront affirmer « Christ est ressuscité » ?

En allant plus loin, combien pourront dire : « Je crois que, par le baptême et la foi, je suis ressuscité aussi avec Jésus-Christ » ? Nous aurions trop peur d’être ridicules. Alors que l’occultisme fait des ravages, que les croyances les plus bizarres sont aujourd’hui sur le marché du « spirituel » (OVNI, néopaganisme, Terre-Mère qui écoute, arbres qui parlent, chamanismes multiples…), nous avons parfois peur de dire que nous croyons à la résurrection du Christ et, par Lui, à la nôtre.

Il y a là, incontestablement, une victoire de l’esprit du monde et de son inspirateur[1], celui que Jésus appelle le diable[2] ou Satan. Cette victoire est d‘ailleurs rendue d’autant plus facile du fait que nombre de chrétiens ne croient plus à l’existence du diable. Avec lui disparaissent aussi toutes les œuvres qui lui étaient attribuées. Tout devient équivalent, c’est ce que l’on nomme le relativisme, qui se pare d’une allure de tolérance et de respect pour détruire tous les cadres moraux hérités de nos cultures originelles.

Le cœur de la foi chrétienne réside pourtant dans ces deux mots. Ce point nodal est très simplement exprimé par Paul dans la première lettre aux Corinthiens, chapitre 15, versets 13-14 :

« 13  S’il n’y a pas de résurrection des morts, Christ non plus n’est pas ressuscité.

14  Et si Christ n’est pas ressuscité, alors notre prédication est vaine, et votre foi aussi est vaine. » Version La Colombe, Segond Édition Révisée)

Celui qui nie la résurrection du Christ et celle, consécutive, des morts en Christ, nie le christianisme. Il n’y a pas de foi chrétienne sans proclamation de cette folie : Christ est ressuscité !

Un chrétien qui refuse de croire (au nom du bon sens athée) à la résurrection n’est pas un chrétien, selon la définition donnée en ouverture, il peut être simplement un admirateur de Jésus de Nazareth, le sage philosophe palestinien, comme on peut admirer Nelson Mandela ou Jean Jaurès[3]. Ce n’est pas une affirmation personnelle, mais celle de Paul, l’apôtre le plus respecté, celui qui a établi véritablement la doctrine chrétienne.

Le second terme est « car vous êtes morts ». La citation de Paul qui nous sert de base inverse en effet la logique de la résurrection. Mais, pour pouvoir ressusciter, il faut d’abord être mort. Et là, on peut légitimement ne rien comprendre, car nous lisons en Jean 3 : 3 :

« Jésus lui répondit : En vérité, en vérité je te le dis, si un homme ne naît de nouveau il ne peut voir le royaume de Dieu. » Version SER.

Nous pouvons y ajouter Jean 3 : 6 :

« Ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l’Esprit est esprit. » Version SER

Jésus parle de naissance, pas de mort. S’il faut naître de nouveau, comment peut-on être mort en Christ ? Eh bien, forcément parce que ces deux moments n’en font qu’un : naître de nouveau, c’est mourir à la chair. Rappelons simplement que, dans le Nouveau Testament, la chair est la vie naturelle biologique de l’humain, avec ses pensées et ses comportements. C’est à cela que nous devons mourir, pour naître d’un nouvel esprit.

Les propos de Jésus sont clairs : sans cette nouvelle naissance spirituelle, pas de royaume de Dieu possible. Nous voyons donc que la mort à la chair et la résurrection en Christ, par le baptême, sont le cœur de la foi. Si un homme ou une femme ne saisissait que cela de l’Évangile, il serait sauvé à coup sûr !

Une vie cachée, avec Christ, en haut

Que peut bien signifier cette vie cachée ? ll faut passer par le verbe grec, krupto, pour en saisir le sens. Le sens premier est : couvrir pour protéger, cacher pour soustraire aux regards. Mais nous avons aussi un sens figuré : faire mystère de, garder secret, ne pas produire au dehors. Nous retiendrons deux idées, une au sens propre et une au sens figuré : 1 / notre vie est protégée en Christ ; 2/ le mystère du salut de notre vie n’est pas encore connu. Ce sens est d’ailleurs confirmé par le verset 4 de notre texte : Quand Christ, votre vie, paraîtra, alors vous paraîtrez aussi avec lui dans la gloire. 

Il ne s’agit donc pas de se retirer du monde pour aller se cacher dans les jupes du Christ, mais d’être sous sa protection. Ce statut spirituel engage notre responsabilité.

Nos pensées doivent se réorienter « vers le haut », nous dit Paul. Je voudrais ici citer un court extrait d’un article d’Anselm Grün, moine bénédictin allemand, auteur de nombreux livres sur la vie chrétienne. Cet extrait est tiré de la revue Prier, revue catholique consacrée à la vie de prière. Dans un article qui reprend les métaphores sportives de Paul, il reformule notre verset 3 à sa façon :

« Cela veut dire qu’à travers tout ce que nous faisons et pensons, nous devons nous ouvrir à cette réalité plus grande que nous-mêmes et laisser derrière nous notre style de vie actuel. Si Jésus nous précède, c’est pour que nous puissions lui courir après ! Comme l’écrit Paul : « oubliant ce qui est en arrière et me portant vers ce qui est en avant, je cours vers le but, pour remporter le prix de la vocation céleste de Dieu en Jésus Christ » (Philippiens 3 : 12-14).

« S’ouvrir à cette réalité plus grande que nous », c’est choisir la transcendance, c’en est même la définition. C’est exactement ce que Paul dit :

« Attachez-vous aux choses d’en haut, », c’est sortir du terrestre, du dépendant, du matériel du fragile, du contingent, donc de l’immanent, de ce qui est à ras de terre, à hauteur d’homme. Cela revient à changer « notre style de vie actuel », donc à ne pas s’attacher à tout ce que la vie charnelle nous propose.

Deux écueils à éviter

Comme souvent dans la vie chrétienne, il faut savoir déjouer les pièges et trouver la bonne lecture de la Parole. On peut facilement se tromper sur le sens pratique de cette injonction fraternelle de Paul. Il faut savoir se garder de deux attitudes opposées et un peu extrêmes, que je résume ici à deux versets de la Bible.

L’excès de justice et de sagesse : Ecclésiaste 7 : 16 : « Ne sois pas juste à l’excès, et ne te montre pas trop sage : pourquoi te détruirais-tu ? » version NEG. Voici la lecture fautive de ce verset, l’excès. Il est tentant de verser dans l’ascèse et le mépris total de ce monde et de ses habitants. C’est la tentation de l’ermite, du moine au mauvais sens du terme. Le monde est charnel, mauvais, perdu loin de Dieu : quittons-le, même de notre vivant, rompons totalement avec lui. C’est le risque sectaire assuré. Ce n’est pas du tout l’esprit des lettres de Paul.

L’excès de naïveté ou de laxisme : Tite 1 : 15 : « Tout est pur pour ceux qui sont purs ; » version NEG. Cela représente l’autre position extrême. Je ne risque rien en ce monde, car je suis une nouvelle créature spirituelle. Rien ne peut me souiller. Les mêmes ajoutent souvent une lecture très libérale d’une autre phrase de Paul : 1 Corinthiens 10 : 23  « Tout est permis, mais tout n’est pas utile ; tout est permis, mais tout n’édifie pas. » Dans ce cas-là, on glisse sur le mot « utile », on insiste sur le « tout est permis ». La question est : quel est notre rôle dans ce jeu, à part d’y participer ? L’expérience prouve que ce n’est jamais le chrétien isolé qui gagne son entourage, mais que c’est toujours l’entourage qui finit par l’emporter.

Une sage lecture : vie cachée et vie visible

La bonne lecture de ce texte est dans la fermeté et l’équilibre de notre statut. Si nous savons que nous sommes morts et ressuscités avec le Christ, alors nous serons fermes dans notre foi. Dès lors, nous pouvons vivre de manière équilibrée, au milieu de notre famille, de notre voisinage, de nos collègues de travail, d’études… L’équilibre est trouvé dans la priorité que nous donnons aux choses d’en haut par rapport à celles qui sont sur la terre. C’est le contenu précis des « choses d’en haut » qui détermine cette priorité et qui la justifie.

C’est ce qui est dans la vie cachée, cette part de mystère à découvrir. Nous sommes là dans une vie de découverte et de progrès spirituels. C’est la vie de prière, sous tous ses aspects, dans laquelle la marge de progrès est toujours énorme. C’est la connaissance profonde de la Parole de Dieu, sous toutes les formes de la Révélation (Bible, prophéties et prédications), univers complet que nous n’aurons jamais fini d’explorer.

C’est la vie de communion fraternelle, dans le cadre de l’église locale, apprendre à voir tout ce qui est bon dans le frère et la sœur, aimer et aider, partager les expériences et les vivre ensemble. C’est la vie de témoignage dans la société où nous vivons. Si nous sommes remplis des choses d’en haut, nous ne manquerons pas d’occasions de témoigner, elles viendront toutes seules.

Alors nous pourrons vivre une vie visible (par opposition au « caché »précédent) normale, sans nous imposer des règles dures et absurdes. Aller assister à un match de foot avec des copains (mais pas casser les voitures ou le nez des supporters adverses), écouter un bon concert de rock ou de jazz (sans avoir besoin de substances euphorisantes plus ou moins illicites), aller à la pêche, jouer aux boules, lire des BD, des romans d’aventures, collectionner les timbres ou les capsules de bière, bref faire tout ce qui est banal aux yeux des humains. Nous ne nous attacherons pas du cœur à tout cela, car notre vie est ailleurs ; mais nous serons un joyeux compère ou une amie agréable, et soyons sûrs que l’occasion viendra de témoigner « des choses d’en haut » et d’en montrer le chemin à ceux qui s’interrogent, car beaucoup en ressentent l’absence sans pouvoir mettre un nom dessus.

Voila esquissée à très grands traits cette vie cachée avec Christ et la manière dont cela change tout sans que rien, en apparence, ne soit différent. Que Dieu et le Christ nous y aident chaque jour.

Jean-Michel Dauriac – Juillet 2024.


[1] Je ne veux pas ici parler du capitalisme et du matérialisme, qui ne sont que des instruments au service d’un projet spirituel ancien.

[2] Diabolos, en grec, signifie le diviseur. La question de fond n’est pas de savoir si l’on croit au diable, mais si l’on admet qu’il y a une lutte spirituelle dont le cosmos et l’humanité sont les enjeux. Si oui, le nom de la force antagoniste à Dieu (sous ses divers noms) est bien celui du diviseur.

[3] Nombre de protestants libéraux radicaux rejettent tout ce qui touche à la divinité du Christ, de sa conception à son ascension, sans parler de son retour attendu. Cela les a menés dans les bras de la Libre Pensée ; ils sont des protestants culturels, comme le sont Lionel Jospin ou feu Michel Rocard. Je parle ici de foi chrétienne, pas de culture chrétienne ou d’éthique, mots souvent utilisés pour contourner le réel.

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De Montaigne à Richemont, la voie de l’honneur – 14 juillet 1944

Annette Voineau

Comité de soutien du Mémorial de la Ferme de Richemont

 Voici un livre absolument nécessaire. Mais ce n’est pas la seule raison d’être de cet article. Il s’agit aussi d’un devoir d’amitié envers l’auteur.

Lorsque je suis arrivé au Lycée Michel Montaigne de Bordeaux, d’abord comme professeur stagiaire en 1983, puis comme titulaire en CPGE en 1996, j’ignorais tout de ce que représentait la Ferme de Richemont. Pour moi, c’était le nom d’une rue proche du Lycée, où le CRDP possédait des locaux où l’on se réunissait parfois pour des séances de travail. Il a fallu que je fasse la connaissance d’Annette Voineau, une de mes collègues, pour apprendre ce que ce terme recouvrait de dramatique pour notre lycée et ses étudiants. Annette m’a expliqué rapidement que cela était lié au maquis et à la Seconde Guerre mondiale, et que ce fut un moment tragique pour de jeunes hommes qui refusaient de capituler face à l’occupation allemande.

Nous sommes devenus des amis avec Annette, partageant des moments de discussion profonde, mais aussi des repas avec nos quelques collègues les plus proches. Quand elle est partie à la retraite, nous nous retrouvions de temps en temps (pas assez souvent, hélas !) pour le plaisir de passer un moment ensemble. Une de nos premières amies, Françoise Grasset, est partie la première, vaincue par le crabe. Puis j’ai appris avec un retard certain, la mort inattendue d’Annette, des suites du Covid, m’a-t-on dit. Les rangs de notre cercle s’éclaircissent, nos âges avancent.

Une photographie de 2009, dans la cour du Lycée : à gauche Isabelle Delorme, au centre votre serviteur, à droite Annette Voineau, tous trois alors professeurs au Lycée Michel Montaigne

Annette n’a jamais cessé de faire de l’histoire. Bien sûr en l’enseignant longtemps, mais aussi en se mobilisant autour de ce que nous étions d’accord d’appeler le « travail de mémoire » (et non l’imbécile devoir de mémoire promu partout). Oradour-sur-Glane était, chaque année, le but d’une sortie avec des élèves du lycée. En cela, elle avait formidablement raison : la visite des ruines du village provoque toujours sidération et interrogations chez les jeunes. Bien plus efficace qu’un cours magistral. Elle s’intéressait aussi beaucoup aux monuments aux morts, qui étaient pour elle des témoins capitaux de la Grande Boucherie de 1914-18. Je me souviens d’une fois où elle nous fit visite en Creuse et où elle voulait, avant de repartir, aller voir le monument aux morts de La forêt du Temple, très modeste village creusois, mais connu sous cet angle-là. Elle mena également un combat persévérant pour la mémoire des événements du 14 juillet 1994 à Saucats. Voici où ‘on en revient à ce livre, publié à titre posthume, mais dont le travail était quasiment achevé.

Je résume seulement les faits à leur plus simple expression. Dans les Classes Préparatoires de Montaigne, il existait une prépa à Saint-Cyr (interdite par les Allemands, mais aussitôt déguisée en prépa HEC) et une autre à la Colo (comprenez les métiers de la colonisation). Les élèves qui s’y trouvaient étaient souvent des fils de militaires ou d’anciens combattants, voire d’administrateurs coloniaux. Ils étaient ce qu’il convient d’appeler de jeunes patriotes. Beaucoup refusaient l’esprit de défaite et de collaboration de la France de Vichy. Peu à peu ces jeunes s’engagèrent dans des actions de résistance. Et naquit, début 1944, l’idée de créer un maquis pour chasser les Allemands, car on savait leur défaite inéluctable. Ce maquis choisit de s’installer dans une ferme abandonnée de la commune de Saucats, à 25 km au sud-est de Bordeaux, à l’entrée de la forêt landaise. C’est là que le 14 juillet 1944 la Milice arrivée la première, accompagnée du jeune réisistant qu’ils avaient contraint à révéler la cache du maquis, fait appel au soutien des Allemands: ils donnèrent l’assaut à cette ferme et tuèrent les jeunes du maquis, presque tous étudiants du lycée Michel Montaigne. Ce site devint, après 1945, un lieu de mémoire, avec un monument commémoratif et une cérémonie du souvenir chaque 14 juillet.

Mais le temps passe et les témoins et les rares rescapés disparaissent. Annette savait qu’il fallait agir pour que cet épisode, qui fut un peu la gloire du Lycée Montaigne (voir son titre) ne sombre pas dans l’oubli. C’est le but de ce livre que de réunir un dossier complet sur les protagonistes et de livrer un récit des événements. Annette y fait preuve d’une grande rigueur d’historienne. Elle traque les indices, multiplie les sources, ne brode pas quand elles sont floues ou vides. Le livre est construit en deux grandes sections : la première est le récit proprement dit, raconté en chapitres thématiques, fort plaisants à lire ; la seconde est appelée Annexe, mais elle est surtout importante pour les notices biographiques des personnes impliquées dans cette histoire tragique. Annette a su donner vie à ces noms que l’on peut lire sur la plaque commémorative dans le hall de l’entrée principale (aujourd’hui désaffectée, ce qui est un non-sens) du lycée. Le livre est aussi abondamment illustré de photos, dessins et fac-similé de documents. Le tout représente l’œuvre qu’il fallait faire pour que la mémoire du sacrifice de ces jeunes soit entretenue. Annette ne cache pas leur inexpérience et leur « romantisme », mais elle salue leur courage au service quelque chose de plus grand qu’eux, la France. On se prend à songer au contraste entre cette jeunesse du début des années 1940 et celle d’aujourd’hui, pour laquelle le RN est l’horizon indépassable du fascisme. Pour reprendre une expression des maoïstes soixante-huitards, ce sont des tigres de papier. C’était un temps où le mot patriote avait un sens existentiel et dangereux. Comment en sommes-nous venus à en faire une insulte de gauche ?

Ce livre n’est pas exempt de reproches formels. Il y a beaucoup de coquilles d’imprimerie et de fautes de ponctuation. Parfois des répétitions de certains passages. Mais ces petits défauts n’altèrent en rien la grandeur du projet et sa valeur. Il faut lire ce livre et le faire lire. C’est une façon de perpétuer le souvenir des martyrs de Saucats, mais aussi de faire vivre Annette dans son travail.

Il faut le commander sur le site du Comité de soutien du Mémorial de la ferme de Richemont, voici le lien direct pour obtenir le bon de commande (l’ouvrage coûte 19€ plus le port) : Comité du Mémorial.

Le bon de commande est aussi ci-dessous :

Même si cet ouvrage traite d’un épisode modeste de la Résistance, il a la vertu de bien faire saisir ce qui se jouait alors dans notre pays : la veulerie de l’abandon, avec son cortège d’ignominies, ou le courage de dire non, chacun avec ses moyens. Il serait faux de croire que c’est du passé. Il y a bien plus d’analogies avec notre époque que l’on ne le croit.

Merci Annette de ce beau cadeau aux générations futures.

Jean-Michel Dauriac – Août 2024

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