La version audio est là:
Lectures de base : Esdras 4 : 1-5 ; 24. version NEG.
« 1 Les adversaires de Juda et de Benjamin apprirent que les exilés bâtissaient un temple pour le SEIGNEUR, le Dieu d’Israël.
2 Ils s’approchèrent de Zorobabel et des chefs de famille et leur dirent : Nous bâtirons avec vous ; car, comme vous, nous cherchons votre Dieu, et nous lui offrons des sacrifices depuis le temps d’Asarhaddon, roi d’Assyrie, qui nous a fait monter ici.
3 Mais Zorobabel, Josué et les autres chefs des familles d’Israël leur répondirent : Ce n’est pas à vous et à nous de bâtir une maison pour notre Dieu ; nous bâtirons nous seuls pour le SEIGNEUR, le Dieu d’Israël, comme nous l’a ordonné le roi Cyrus, roi de Perse.
4 Alors le peuple du pays se mit à décourager le peuple de Juda et à l’intimider pour l’empêcher de bâtir ;
- ils payèrent des conseillers contre eux, pour faire échouer leur projet, pendant tous les jours de Cyrus, roi de Perse, et jusqu’au règne de Darius, roi de Perse. […]
24 Alors s’arrêta l’ouvrage de la maison de Dieu à Jérusalem, et il fut interrompu jusqu’à la seconde année du règne de Darius, roi de Perse »
Après avoir rétabli la communion avec Dieu par le culte, les Hébreux vont pouvoir poser les fondations du Temple. Lisons Esdras 3 : 8-11 : « 8 ¶ La deuxième année après leur arrivée à la maison de Dieu à Jérusalem, au deuxième mois, Zorobabel, fils de Shéaltiel, Josué, fils de Yotsadaq, avec le reste de leurs frères, les prêtres et les lévites, et tous ceux qui étaient revenus de la captivité à Jérusalem, commencèrent le travail et chargèrent les lévites depuis l’âge de vingt ans et au-dessus de surveiller les travaux de la maison du SEIGNEUR.
9 Et Josué, avec ses fils et ses frères, Qadmiel, avec ses fils qui étaient judéens, les fils de Hénadad, avec leurs fils et leurs frères les lévites, se chargèrent tous ensemble de surveiller ceux qui travaillaient à la maison de Dieu.
10 Lorsque les bâtisseurs posèrent les fondations du temple du SEIGNEUR, on mit en place les prêtres en costume, avec les trompettes, et les lévites, fils d’Asaph, avec les cymbales, afin de louer le SEIGNEUR d’après les indications de David, roi d’Israël
11. Ils louaient et célébraient le SEIGNEUR par le chœur : « Car il est bon, car sa fidélité envers Israël est pour toujours ! » Et tout le peuple lança une grande acclamation, en louant le SEIGNEUR, parce qu’on posait les fondations de la maison du SEIGNEUR. (version NEG) » Enfin la mission glorieuse commence. Cela démarre par une grande joie, comme nous le rapporte le verset 11. Même si les plus anciens – il devait donc y avoir des personnes très âgées –, eux, pleurent en se souvenant du premier Temple et de sa destruction. C’est le temps de la restauration, c’est la fête. Il y a toujours de l’ambiance et de l’enthousiasme quand on démarre un grand projet. Et c’est humain, très humain. Cependant, il faut avoir une vision plus large et songer à l’ensemble de l’oeuvre. Ecclésiaste 7 : 8 nous dit : « Mieux vaut la fin d’une chose que son commencement… » Ne soyons pas des enfants. Poser la première pierre est toujours facile, remettre les clés au propriétaire en fin de chantier est plus ardu, mais aussi bien plus satisfaisant.
Car, après ces débuts festifs, commencent les vrais difficultés. Ce sont les passages que nous avons lus au début de cette méditation.
Au verset 1, l’expression « Les ennemis de Juda et Benjamin » indique un contexte hostile. Malheureusement, le monde n’est pas vertueux, il est à l’image des hommes. Il faut être lucide, le peuple de Dieu a des ennemis, y compris dans ses voisins. Ce verset confirme d’ailleurs ce que nous avons dit à propos d’Esdras 3 :3, à savoir que les Hébreux, par crainte des populations locales, avaient d’abord restauré l’autel et le culte. C’est une des caractéristiques d’un esprit « réveillé » que d’être lucide et prudent. Or, ces ennemis apprennent quelle est la finalité du retour des captifs, rebâtir le Temple. Tant qu’ils ne savaient rien, ils ne se manifestaient pas concrètement. Mais lorsque le projet commence à devenir réel, avec la pose des fondations, leur hostilité devient visible. Nous devons savoir que, si nous annonçons notre intention de rebâtir le Temple aux gens de notre époque, cela va se passer ainsi. Mais que signifie donc « rebâtir le Temple » ?
Il s’agit, d’une manière ou d’une autre, de remettre Dieu au cœur de la cité. Non pas pour revenir en arrière, vers la chrétienté médiévale, vers la théocratie ou pour l’alliance de l’Eglise et de l’Etat. Mais pour proposer aux hommes et aux femmes de notre voisinage – notre pays, notre région, notre ville… – de découvrir la culte authentique, le bon, l’agréable et le parfait. Or, il y a énormément de personnes qui ne veulent pas de cela.
Voyons ce qui se passe à Jérusalem : le verset 2 du chapitre 4 nous décrit la démarche des ennemis. Ils viennent proposer aux Hébreux de bâtir avec eux, car, disent-ils : « nous invoquons votre Dieu. » Voici le piège de la séduction : ce ne sont donc pas des ennemis, ils ont la même foi et accomplissent le même culte. Ce piège est aussi vieux que la tentation du Serpent dans le jardin d’Eden. « Dieu n’a-t-il pas dit ? » dit le serpent. Sous entendu : je suis avec vous, je sais ce que Dieu a dit et veut. Eve et Adam n’ont pas su déjouer cette ruse et ils ont alors découvert qu’ils s’étaient distanciés de Dieu par leur désobéissance. Si les Hébreux acceptent avec joie la proposition des ennemis, ils passent à côté de leur mission. Ils se laissent berner par un pseudo-discours religieux. Aujourd’hui ce discours des ennemis existe, il est omniprésent chez les marchands de syncrétisme, les gourous d’un faux oecuménisme, les vendeurs de zénitude et de développement personnel. Il est aussi chez certains politiques qui draguent les voix chrétiennes. Ils usent tous des mêmes ruses, mettent en avant Dieu et la foi. Et il est facile de se laisser berner. Je ne vais pas ici vous détailler les exemples bibliques de ce genre de piège, mais il y en a beaucoup, tant dans la Bible juive que dans le Nouveau Testament.
Comment réagir ? Faut-il passer pour des sectaires, des réactionnaires, des esprits obtus, alors que le discours dominant – mensonger, rappelons-le – est irénique et universaliste autant que relativiste. Oui, il faut oser être fidèle à la révélation et à la mission donnée par le réveil de l’esprit.
Le verset 3 montre que les chefs des Hébreux ont été éclairés et ont bien marqué leurs différences. Ils ont rappelé l’Edit de Cyrus, la suprême autorité terrestre. Ils avaient conscience de leur responsabilité et ne se sont pas laissés endormir par des discours trompeurs.
Quand nous sommes ainsi sollicités, pour nous fondre dans un grand tout qui a l’apparence de la piété, mais qui en est en réalité la négation de fond, soyons fermes sur nos convictions. Il ne s’agit nullement d’un manque d’amour, mais de fidélité à ce qui nous sauve : la Parole de Dieu donnée aux hommes. Jean a dit, dans son épitre, ch. 4, versets 1 et 2 : « 1 Bien-aimés, n’ajoutez pas foi à tout esprit ; mais éprouvez les esprits, pour savoir s’ils sont de Dieu, car plusieurs faux prophètes sont venus dans le monde.
2 Reconnaissez à ceci l’Esprit de Dieu : tout esprit qui se déclare publiquement pour Jésus-Christ venu en chair est de Dieu. (version NEG) »
Seul l’Esprit de Dieu peut éprouver les esprits. L’homme charnel se laisse berner par l’esprit séducteur des discours aimables du monde. L’homme spirituel – celui qui a l’esprit « réveillé » – voit l’esprit à l’œuvre derrière les belles paroles de séduction. Les Hébreux ont su discerner cela, par leur esprit en éveil. Les voici donc sauvés de ce piège, si tentant. Est-ce fini ?
Bien sûr que non, car l’esprit des ennemis ne peut renoncer. Mais quel est donc cet esprit si dangereux ? Allons encore en 1 Jean 5 :19 : « Nous savons que nous sommes de Dieu, et que le monde entier est au pouvoir (ou gît sous le pouvoir) du Malin. » Il s’agit donc d’une lutte entre deux esprits. Celui de Dieu – qui nous assure que nous sommes à lui – et celui du Malin, qui n’est pas un Dieu du mal. En Hébreu, ce mot « malin » veut dire « adversaire, accusateur », et en grec, c’est le mot « diabolos – diable », qui signifie : le diviseur, le dénonciateur. Ce discours trompeur se présente sous le masque de l’unité de la foi pour diviser Dieu et son peuple. Ne craignons pas d’être fermes et de refuser tout compromis. Ceci ne nous empêche nullement d’être fraternels et pleins d’amour pour ceux qui sont sous l’emprise de cet esprit. Car nous n’avons nulle supériorité, nul avantage supplémentaire, nous ne sommes pas les auteurs de notre éveil et de notre salut. Nous avons simplement accepté de nous laisser réveiller. Pour établir le culte vrai aux yeux du monde afin qu’il ait le choix de la vie.
Les versets 4 et 5 montrent que les ennemis tentèrent de décourager le peuple, de l’intimider. Puis de le corrompre. Cela dura plusieurs années, si l’on se réfère à la chronologie des faits. La lutte a donc été longue et harassante pour les missionnés de Dieu. Ne croyons pas que nous échapperons à la lutte si nous affichons clairement la bannière de Dieu : toute la Bible nous atteste du contraire. Marcher et bâtir avec Dieu, c’est combattre sans cesse contre l’une ou l’autre des attaques du diviseur.
Cette lutte est remontée jusqu’à l’Empereur, à plusieurs reprises. Les Hébreux furent dénoncés comme préparant une révolte – lire les versets 6 à 24 du chapitre 4. Les arguments choisis ont fait mouche et Artaxerxès y fut sensible. Le verset 24 montre le coup d’arrêt du projet du Temple. Triste défaite. Mais que fait donc Dieu ? Pendant près de 10 ans, rien. Alors, où est la morale, où est la victoire ? le mal a triomphé. A quoi a servi l’esprit, la lucidité et le culte pratiqué ? A vues humaines, à rien. Celui qui sonde la Bible et la vie des hommes et des femmes de Dieu dans l’histoire de l’Eglise universelle sait que cela arrive souvent. Parfois Dieu semble nous abandonner. Dans le célèbre chapitre 11 de la Lettre aux Hébreux, l’auteur écrit à propos de tous ces individus qui ont espéré et vécu par la foi :
« Tous ceux-là, à la foi desquels il a été rendu témoignage, n’ont pas obtenu ce qui leur était promis. » Dieu serait-il menteur ? Ce verset met en lumière la différence de temps entre les hommes ou Dieu. Les hommes peuvent avoir l’impression d’être laissés seuls. Le grand mystique Jean de La Croix appelait ce temps de lutte « la nuit ». Nous avons vu aussi Job passer par là. Seule la foi peut alors nous aider. Je reprends pour terminer la parole de Qohélet citée plus haut :
« Mieux vaut l’aboutissement d‘une affaire que son commencement. »
Nous verrons l’aboutissement dans les prochaines méditations
Jean-Michel Dauriac – juin 2020.
Comments