Lecture : Lettre aux Hébreux chapitre 12 : versets 1 & 2a.
« Nous donc aussi, puisque nous sommes entourés d’une si grande nuée de témoins, rejetons tout fardeau et le péché qui nous enlace si facilement, et courons avec persévérance l’épreuve qui nous est proposée, les yeux fixés sur Jésus qui est le pionnier de la foi et qui la porte à son accomplissement. »
Voici un texte très connu mais sur lequel finalement nous glissons souvent, compte tenu de sa position dans le texte.
En effet, ces versets suivent le formidable chapitre 11 entièrement consacré à la foi.
Nous sommes alors au cœur de notre espérance chrétienne, car la foi est la seule réponse que nous puissions donner à la Grâce qui nous est faite en Jésus. Or ce chapitre est tellement puissant et riche qu’il attire toute notre attention par la richesses de son contenu, à commencer par une définition canonique de la foi en son verset 1
« La foi, c’est la réalité de ce qu’on espère, l’attestation de choses qu’on ne voit pas » Hébreux 11 :1
Il est donc très facile ensuite de prendre ces deux versets brefs comme une transition-bilan. Or, ils ont un sens profond et ont interpellé des hommes de Dieu de tous temps. Je citerai ici seulement deux chrétiens du XXème siècle que vous pouvez connaître :
– Wilfred Monod (1867-1943), pasteur d’une lignée de pasteurs protestants depuis plusieurs générations et qui a tenu le Temple de l’Oratoire du Louvre à Paris, le plus grand temple français par sa réputation. Il a écrit à la fin des années 1920 deux volumes qui portent ce titre et que je ne saurais trop vous recommander de lire.
– David Wilkerson (1931-2011), pasteur évangéliste américains, auteur de « La croix et le poignard », fondateur de Teen Challenge en 1968 et d ‘une grande église indépendante de New York, la Times Square Church.
Mais ce matin, je ne souhaite pas répercuter leurs idées mais vous proposer une autre lecture que vous pourrez compléter par ces lectures.
Je vous propose trois temps de réflexion rapide pour pénétrer ces versets et nous les approprier, les rendre opératoires dans notre existence spirituelle et matérielle.
Premier temps : Quelle est la raison d’être de cette nuée de témoins ?
Nous trouvons la réponse claire dans notre verset, introduit sans ambiguïté par la conjonction « puisque », dont vous savez depuis l’école primaire (autrefois !) qu’elle introduit une subordonnée conjonctive de cause
– Premier but visé : Rejeter tout fardeau et le péché. La présence de ces témoins est donc un encouragement à « lâcher prise » comme on dit aujourd’hui dans le jargon du « développement personnel ». Nous avons chanté souvent « Entre tes mains j’abandonne tout ce que j’appelle mien ». Le fardeau fait partie de nous souvent et nous le trimballons sur notre dos partout. Posons nos valises car nous avons de beaux exemples qui vont nous y aider. Aucun fardeau n’est trop lourd pour ne pas pouvoir être déposé ! Mais au-delà du fardeau, les témoins sont là pour que nous rejetions aussi la cause du fardeau, le péché dont il est dit qu’il nous enlace si facilement – idée de freiner la marche, de bloquer les mouvements… – S’alléger le corps et l’esprit car els deux vont ensemble. Le deuxième aspect est d’ailleurs sous cet angle là.
– Deuxième but visé : Courir avec persévérance l’épreuve proposée. Une fois allégés, nous sommes alors en mesure de courir sans entraves. La métaphore de la course est courante dans le Nouveau Testament car elle est culturellement populaire. L’athlétisme est dans le monde hellénique une école corporelle et spirituelle (on court nu pour n’être gêné par rien). Cette course doit s’appuyer sur la persévérance, donc dans la durée d’une nouvelle vie. Il s’agit d’une épreuve, pas d’un petit jogging amateur. Nous sommes engagés par notre repentance lors de notre conversion, nous somme sur la liste des concurrents et nous devons tout mettre en œuvre pour achever la course, sinon nous n’aurons pas le prix, nous aurons couru pour rien. (Ceci mériterait une étude approfondie car c’est beaucoup moins simple qu’on ne le croit !). Notre vie avec Dieu demande effort et volonté, ce n’est pas une vie de repos, de farniente et de facilité, ce qui ne veut absolument pas dire que ce soit douleurs et ennuis nécessaires. Le bonheur est le but du chrétien, pas la souffrance. Les témoins sont là pour nous aider quand le moral tombe.
– Troisième but visé : Fixer les yeux sur Jésus. Si les témoins peuvent nous aider, ils ne sauraient remplacer le seul qui a payé le prix et nous a ouvert la voie. Ils peuvent cependant grandement nous encourager à regarder à Christ à travers leurs vies, leurs combats et leurs histoires.
Deuxième temps : Qui sont donc ces témoins en nuée autour de nous ?
Là aussi je vois quatre types de témoins que je ne hiérarchiserais pas, malgré leur position différente.
1. Les « héros de la foi » du chapitre XI des Hébreux. Ils sont la référence première par leur rassemblement dans ce texte. Ce chapitre est un beau poème à la gloire de la foi, il a une force de construction par le procédé de l’anaphore « Moi, Président de la République… »). Ici c’est le « C’est par la foi que… » vient nous donner une interprétation particulière de ces personnages bibliques que sont Abel, Hénoch, Abraham et les autres. Mais attention à ne pas en faire des images pieuses ! Ce ne sont que des hommes qui, de surcroît, n’ont pas obtenu gain de cause dans leur espérance, comme le dit les versets 13 et 39 du chapitre 11 :
« C’est selon la foi que tous ceux-là sont morts, sans avoir obtenu les choses promises ; cependant, ils les ont vues et saluées de loin… »
« Et tous ceux-là, qui avaient reçu par leur foi un bon témoignage, n’ont pas obtenu ce qui avait été promis. »
Tous ces héros ont vécu dans un temps de révélation incomplète, souvent très personnelle, où la loi et le salut étaient collectifs (Israël)
2 . Tous les personnages de la Bible sont là pour témoigner de quelque chose qui peut nous enseigner et ce serait bien dommage de réduire la liste à Hébreux 11. Merci à tous ces croyants moins célèbres qui apparaissent au détour d’un récit, parfois une seule fois, dans une seule phrase. Tel centenier romain ou tel soldat du roi David. La Bible, véritable bibliothèque fourmille d’exemples, de « témoins » qu’il nous appartient d’exploiter. Les personnages du Nouveau testament nous enseignent autrement car ils sont sous une autre alliance et apportent une relation intime avec Jésus
3 . Mais au-delà de ce que contient la Bible ; il faut aussi, de mon point de vue, ajouter tous les « saints » de tous les temps chrétiens. Certes, nous protestants, nous n’adhérons pas au culte des saints tels que l’Eglise catholique le pratique. Mais est-ce une raison pour ne pas être encouragé par la vie de ces hommes et femmes de Dieu qui ont mené le bon, combat et achevé l’épreuve en vainqueur. Augustin est un géant de la foi. François d’Assises est un homme exceptionnel par sa vision et sa vie. Il existe une multitude de croyants de toutes dénominations qui ont vécu des vies de consécration et d ‘amour. Qu’ils soient canonisés ou non n’a aucune importance : ils sont dans la nuée de témoins.
4 . Mais au-delà, les frères et sœurs que nous avons côtoyés ou côtoyons peuvent être pour nous aussi des témoins qui nous encouragent. J’ai eu le privilège de rencontrer et accompagner dans ma vie chrétienne des hommes et des femmes de Dieu, anonymes, simples et pourtant dégageant la puissance de Dieu par leur vie. Leurs noms, leurs visages et leurs actions restent gravés à jamais dans ma mémoire. Ils sont membres de cette nuée de témoins.
Extrait du texte de David Wilkerson :
« Comme je considère cette nuée de témoins, je vois les visages d’anciens toxicomanes et alcooliques, d’ex-prostituées et homosexuels, d’anciens gangsters et revendeurs de drogue, d’anciens meurtriers et batteurs de femme, d’anciens infidèles et obsédés de pornographie — des multitudes que la société a repoussées. Ils se sont tous repentis et sont morts dans les bras de Jésus, et maintenant ils sont les témoins de la miséricorde et la patience d’un Père aimant. »
attention ! la traduction est littérale et parfois très mauvais !
Troisième temps : Comment s’appuyer sur cette nuée de témoins ?
1 . D’abord en connaissant au mieux les exemples de la Bible, en la lisant aussi sous cet angle-là. Nous allons y rencontrer la nuée de témoins et Dieu nous fortifie et nous aide par l’exemple d’un seul d’entre eux, selon notre cheminement.
2. En s’inspirant ensuite de ces exemples. Entendons-nous bien, nous ne sommes pas de pâles imitateurs sans personnalité, il ne s’agit pas de singer Moïse ou Paul, cela n’a aucun intérêt et serait même dangereux. J’ai connu des chrétiens mal encadré qui pensaient pouvoir renouveler les expériences surnaturelles de Paul ou des autres apôtres. Il faut de la sagesse en ce domaine. Ces témoins sont des source d’inspiration, des références positives, mais le seul modèle du chrétien, comme son nom l’indique, est le Christ, qui nous rend accessible le divin.
3. En gardant donc les regards sur Jésus en même temps que sur la nuée de témoins. C’est un peu comme sur nos ordinateurs où nous pouvons maintenant avoir une fenêtre ouverte sur le bureau et suivre deux choses en même temps. Notre fenêtre principale est Jésus, la nuée de témoins est la fenêtre secondaire. La lecture de l vie des hommes de Dieu ne remplacera jamais la prière et la méditation de l’Evangile, amis elle peut la compléter.
Il s’agit en fait d’un triangle à maintenir actif en permanence.
Le triangle de l’édification
Voici un beau programme de marche personnelle en vue d’une croissance spirituelle, et dans lequel l’église locale, les frères et sœurs et Jésus trouvent toute leur place pour nous faire approcher Dieu qui demeure inconnaissable par notre être limité durant notre « pèlerinage terrestre » pour reprendre une vieille expression biblique.
Jean-Michel Dauriac
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